27 mai 2004

C'est la lutte finale

Le Liban s'est mis en grève générale aujourd'hui. C'est ma première grève libanaise et c'est plutôt agréable. Moins de voitures qui circulent, moins de travail, on se sent en dimanche en plein jeudi. La raison principale de la grève est la hausse du prix de l'essence, multiplié par quatre en quelques années et qui grimpe toujours. On peut toujours rêver en imaginant que le gouvernement saute devant une pression populaire qui enflerait, enflerait et exploserait devant l'incapacité de ses dirigeants. Ce jour-là, promis, je vous en parle.

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23 mai 2004

Votez vert ou orange

Les élections municipales continuent, aujourd'hui dans le Sud. Je m'y suis rendu un peu par hasard pour constater le processus démocratique. D'un côté (en orange) Amal. De l'autre (en vert et en voile pour les femmes) Hezbollah. La population avait donc droit à des tee-shirts, des casquettes, des drapeaux, ça ressemblait presque à la caravane du Tour de France, sauf que les haut-parleurs diffusaient les messages de haine contre les Etats-Unis et l'ennemi sioniste. Quant aux bureaux de vote, pensez Corse. On fait voter les absents et on rémunère les votants. Bref, des lendemains qui risquent de ne pas chanter. Mais rassurons nous, le Liban est une démocratie et Hezbollah une association caritative qui, certes, souhaiterait que le Liban devienne un pays islamique, mais entretient la cohésion sociale et fabrique de très jolis drapeaux. Heureusement que "Les dirigeants de la Ligue arabe se sont engagés dimanche 23 mai, dernier jour de leur sommet à Tunis, à promouvoir les réformes politiques et sociales dans leurs pays."

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21 mai 2004

Intifada libanaise

Le billet de Gaby Nasr, publié chaque vendredi dans le quotidien francophone L'Orient-le Jour, est un moment d'insolence que beaucoup de Libanais attendent avec impatience. Inspiré en grande partie par le style du Canard enchaîné, Nasr parle chaque semaine des événements marquants pour les petits et les sans-grade opposés aux puissants. Cette semaine, il revient sur l'affaire de financement de l'Intifada par l'Etat libanais. Cet extrait illustre que les Libanais dans leur ensemble ne porte pas vraiment les Palestiniens dans leur coeur, contrairement à ce que racontent leurs dirigeants avec un enthousiasme.

Un bonheur ne venant jamais tout seul, la population doit en plus se coltiner la ratatouille comptable de Senior Siniora. Aspirateur financier assermenté, le Grand Argentier au sourire oblique ne perd pas le nord. La population est en quête d’essence ? Lui, il a le sens de la quête ! De plus, on raconte qu’il voulait proposer d’allonger plus d’un demi-million de biftons verts américains pour soutenir l’intifada. Loupé ! Ses collègues du Conseil des ministres se sont essuyé les pieds sur cette idée lumineuse. Pourtant, les Libanais d’en bas se seraient fait un plaisir de se serrer davantage la ceinture pour étoffer le matelas financier du margoulin Arafat. Mais bon, l’argent ne fait pas le bonheur. Surtout s’il n’y en a plus ! En tout cas, Siniora, lui, n’est jamais en panne d’essence pour parfumer les Palestiniens.

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19 mai 2004

A mort le foot (Vive Valence)

On en arrive au point que si on ne soutient pas l'équipe de foot de "son" pays lorsqu'elle arrive en finale d'une coupe européenne, on passe pour un traître. Je le dis bien haut : le football flatte les bas instincts de l'homme, le rend nationaliste et chauvin, le pousse à devenir un hooligan et l'enlaidit franchement lorsqu'il se prend un but ou pire que "son" équipe triomphe de l'adversaire. Alors c'est très bien que les Marseillairs aient perdu, comme ça on aura autre chose que le récit de leur victoire dans les journaux, peut-être quelques articles sur la Palestine, qui sait.
Et pour la prochaine finale, par pitié, n'oubliez pas une chose : Monaco n'est pas en France, c'est une principauté mafieuse qui ne mérite franchement pas qu'on s'excite pour elle en beuglant des slogans contre "ceux d'en face".

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17 mai 2004

St Anger

Le Liban n'atteindra jamais la plénitude de ses moyens tant qu'il sera en guerre avec ses voisins. Voici un extrait d'un article publié dans L'Orient-le Jour aujourd'hui, et qui montre, de façon orientée certes, que le Liban soutient à sa façon l'instabilité régionale :

À l’initiative du ministre des Finances, Fouad Siniora, le gouvernement se propose d’inscrire à l’ordre du jour de sa réunion hebdomadaire de jeudi une contribution de 600 000 dollars aux Caisses de l’Aqsa et de l’intifada palestiniennes, et ce au moment où un nombre croissant de Libanais ploie sous le joug d’une augmentation délirante du prix de l’essence. Pour justifier cette énième ponction stérile sur le Trésor, M. Siniora rappelle que, lors du sommet arabe organisé à Beyrouth en 2003, le Liban s’était déjà engagé auprès de la Banque islamique à verser un montant de trois millions de dollars au bénéfice du soulèvement palestinien. Et comme le Liban n’a jamais failli à ses promesses...

Heureusement que pendant ce temps, le pape a canonisé Nehmetallah Hardini au Vatican pour la plus grande joie des 7 000 Libanais présents. C'est vrai qu'on s'en fout, mais ça permet d'amuser le peuple et de le distraire de ses problèmes le temps d'un week-end.

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14 mai 2004

Dialogue des cultures, à notre niveau

Il y a des jours où j'ai envie de dire à quel point j'aime le Liban et aujourd'hui en fait partie. Malgré tout, le gouvernement incapable, les routes défoncées, la politique ras les pâquerettes, l'occupation syrienne, la hausse quotidienne du prix de l'essence, la probable pénurie d'électricité cet été, j'aime ce pays au climat si doux, aux habitants si démerdards, la mer en face de chez moi, la montagne juste derrière, tout ce qu'on veut dans les supermarchés, un niveau d'éducation remarquable, quelque chose d'indéfinissable mais qui fait qu'on s'est tous fait avoir, les braves étrangers qui venaient ici par hasard et qui n'en sont presque jamais repartis.

Ce soir suis allé à une conférence à l'université américaine de Beyrouth. Il faut savoir que cette fac est subventionné par les USA mais qu'elle est la plus antiaméricaine du Moyen-Orient. Bref, trois journalistes venaient se rendre compte sur place de ce qu'est la région et discuter avec ses habitants. Revenant de Syrie où ils ont rencontré le Grand Démocrate lui-même, ils ont fait un crochet par Beyrouth et repondaient aux questions d'un parterre hétéroclite, étudiants, profs, je ne sais pas je ne connaissais personne. Comme prévu, les journalistes ont été très diplomates, comme prévu, les questions qui leur étaient adressés étaient beaucoup moins policées. Un exemple : un jeune leur demande ce à quoi ils s'attendaient ici, à des chameaux et des chevaux ? Question débile, les Libanais s'attendent-ils réellement à rencontrer des Cow-boys à New York ? Accueil plutôt hostile et qui a montré l'incompréhension des Libanais devant les USA, ces malheureux journalistes anti-Bush ayant été rapidement assimilés à du gibier néo-conservateurs. Il y a du progrès à faire. La route continue.

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12 mai 2004

Barbarie

Les attentats en Syrie n'ont pas réussi à dissuader les Etats-Unis d'appliquer des sanctions commerciales. La bravache syrienne est amusante, elle ressemble aux rodomontades irakiennes avant la guerre ; les Syriens disent en substance que les Américains ont tort, mais en même temps que ça ne les dérange pas. On verra.

Non, décapiter un occidental n'est pas équivalent à l'humiliation subie par des prisonniers irakiens. Les télévisions nous montrent des Irakiens jurant qu'ils préfèrent la mort à l'humiliation, qu'ils auraient préféré être tués que violés, que pour un musulman, le viol est pire que tout. Comme quoi, nos civilisations restent bien éloignées les unes des autres. Franchement, même si le viol est une chose atroce, décapiter au couteau de boucher de sang-froid quelqu'un qui ne vous a rien fait mais représente l'ennemi, voilà la barbarie à visage humain (pardon masqué, encore une différence de civilisations, les Américains tortionnaires étaient tête nue et fiers de leur connerie, les Arabes cagoulés).

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08 mai 2004

Parisianisme

Nos journaux nationaux sont parfois pleins de surprises et d'ignorance. Dans Le Monde, à propos de l'émission à la con "La ferme des célébrités", on interviewe le patron d'une chaîne concurrente qui explique le succès du concept :

"Quatre Français sur cinq n'habitent pas Paris, et les provinciaux sont contents de voir des Parisiens confrontés à la vie à la campagne"

Paris et le désert français... Il y avait longtemps que je n'avais pas entendu ce genre de commentaires arriérés. Hors de Paris point de salut, et pourtant aujourd'hui, le journal de France 2 ouvrait sur... le retour de l'équipe de foot de Saint-Etienne en première division. D'abord, le foot est un sport inintéressant au possible, et je souhaite ne jamais voir arriver le jour où je m'ennuierai tellement que je devrai m'extasier sur les prouesses des footballeurs pour occuper mon temps. Ensuite, après ce reportage o combien primordial suivait l'information jugée moins intéressante et qui concernait le sadisme de certains soldats américains en Irak. Hallucinant. Toutes les armées du monde pratique ce genre d'exactions, et les Américains ne sont pas excusables, mais quand même, on pensait qu'ils étaient au-dessus du lot ? Qu'ils vouvoyaient les détenus ? Leur offraient des cigares et leur montraient des photos de leur famille ? Il s'agit d'une guerre et les moyens employés ne sont pas toujours moraux. La différence entre les USA et d'autres pays plus hermétiques réside dans le fait que les Américains ont dénoncé ces pratiques et que les coupables seront jugés. La France, de son côté, a mis plus de quarante ans à reconnaître ce que tout le monde savait, à savoir des cas de torture en Algérie.

Alors j'entends beaucoup de Libanais parler de dignité de leurs frères arabes, et que les Américains les humilient. Curieux sursaut en faveur des droits de l'homme. Les étrangers au Liban sont traités comme moins qu'humains, je m'en tire personnellement mieux car je viens d'un pays riche, mais il faut voir le sort réservé aux domestiques et aux ouvriers. C'est du sadisme quotidien que les Arabes ne dénoncent pas, car il ne s'agit pas de leurs frères arabes. Vous savez la fraternité arabe par exemple entre Koweitiens et Irakiens, ou entre Palestiniens et Jordaniens...

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07 mai 2004

A bas Normale Sup !

Pendant que je vous écris, l'équipe de Guillaume Durand sert la soupe à un BHL toujours aussi convaincu de son importance sur Terre. On a eu le privilège de le visionner auparavant dans un reportage narrant ses aventures aux USA, et on a pu le voir pontifier dans un anglais grotesque sur le rôle médiatique de l'intellectuel germanopratin. BHL est dangereux parce qu'il laisse croire que le débat intellectuel est un combat d'egos, de la même façon que des paons comme de Villepin, Jean-François Kahn ou Jean-Marie Colombani.

Le pire c'est que la nouvelle génération est déjà prête à prendre la relève. La télévision nous révèle une horreur de 14 ans, fille de députée, qui a commis un ouvrage intitulé "Dieu est une femme" et balance sa rébellion banale sur tous les écrans sous le regard amusé des journalistes trop heureux de pouvoir faire chier le père élu de mademoiselle. Je ne me souviens plus comment elle se nomme cette jeunette, et j'espère que son nom ne sera jamais célèbre, car elle a un art consommé d'enfiler des clichés comme des perles, et de raconter des conneries, c'est vrai, les mots me manquent lorsque j'assiste à pareil phénomène. D'un autre côté, pour être parfaitement honnête, elle ne raconte pas plus de conneries que BHL qui a pourtant quatre fois son âge au bas mot.

Ce qui me fait penser que je reçois des visites fréquentes et appuyées de iufm.fr, fabrique de profs en France. Alors je me permets de vous dire ceci en toute humilité, mes mystérieux et lettrés visiteurs : Paris est formidable, la France est un pays sublime, mais voyagez, rencontrez du monde, ne considérez pas que la Porte de la Chapelle (si vous êtes à Paris) est la dernière ligne d'horizon. Le Liban est un pays difficile et parfois fatigant, mais il aura au moins eu le mérite d'ouvrir mes yeux d'occidentaux gâtés sur la réalité du monde, et elle n'est pas rose. Ou blanche, comme la chemise-décolleté de BHL.

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04 mai 2004

So That None Shall Feel Safe in the Future (4)

On connaîtrait les auteurs de l'attentat de Damas, d'après L'Orient-le Jour :

Un groupe jusque-là inconnu a revendiqué dans un communiqué reçu hier l’attentat perpétré le 29 avril à Damas qui visait, selon lui, « à venger les victimes de Hama », la ville bombardée en 1982 par l’armée syrienne pour mater les Frères musulmans.
« Le groupe du martyr Adib al-Kilani » a affirmé, dans ce texte faxé à l’AFP à Nicosie, qu’il avait attaqué un bâtiment à Damas « pour tuer des officiers supérieurs et des responsables du régime sectaire qui ont perpétré les massacres les plus horribles contre les habitants et les dignitaires de Hama », à 210 km au nord de la capitale. Selon le communiqué, dont l’authenticité ne peut être vérifiée, « les criminels (visés) devaient être présents dans ce bâtiment, mais ils ont échappé aux moudjahidine (combattants) dont certains ont été tués et les autres ont réussi à s’enfuir ».


A suivre, comme toujours en Syrie.

Concluons sur une note humoristique, ce titre du quotidien Le Monde :

"Européennes : les têtes de listes du PCF seront communistes"

Nous voilà rassurés.

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03 mai 2004

Elections, piège à...

Dimanche se tenait une partie des élections municipales libanaises. C'était surtout l'occasion pour le gouvernement de montrer sa confiance dans la démocratie en déployant aux abords des bureaux de vote un déploiement de forces dignes d'une république bananière. Blindés légers, mitrailleuses montées sur jeeps et soldats armés de M16 surveillaient le processus démocratique dans une ambiance qui sentait le coup d'Etat. Ce qui est impossible car pour qu'il y ait coup d'Etat, il faut qu'il y ait Etat.

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Tripoli

Je vous recommande chaudement la visite de Tripoli, au nord du Liban. Une ville certes conservatrice mais qui en se méfiant des touristes a réussi à préserver un certain intérêt. Il y a la citadelle, les souks, les hammams, tout un ensemble qui attirent visiteurs de toutes sortes, y compris les inévitables Français bobos qui sympathisent avec l'autochtone comme dans les livres de Claire Brétecher (Toutista notamment), ou cet abruti d'Australien qui, pour faire local, à voulu claquer la bise à une jeune femme voilée. Je pense qu'il n'a du son salut qu'à la réputation niaise des Australiens et à leur visible manque de culture générale (ce n'est pas une attaque mais une constatation. On peut en parler quand vous voulez).

Au salon du livre de Tripoli, c'était le souk. On y trouvait des auteurs en quête de public, des universités à la recherche d'étudiants, des conférences sur la solidarité arabe et pour illustrer ce dernier point, des stands de la "République palestinienne". Je n'ai pas eu le courage de trop m'approcher devant les yeux laser des femmes qui tenaient le stand sous la supervision musclée de quelques barbus, mais visiblement c'était plutôt des Tee-shirts à la gloire de Yasser que des drapeaux israéliens qui brûlent tout seuls.

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01 mai 2004

Aujourd'hui l'Europe s'élargit !

Non, je ne me montrerai pas grossier. Il vaut mieux qu'on en parle tranquillement plus tard.

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