22 février 2007

Ordonnances

L'armée israélienne annonce que le hezbollah n'a jamais été aussi fort. Olmert assure que ça reste une bande de tafioles. Pendant ce temps, le Golan semble être le futur champ de batailles des guerres israélo-arabes. Sans parler de l'Iran qui risquerait d'être bombardé par les Etats-Unis avant la fin du mandat de George Bush. Et au Liban on a inventé une nouvelle expression "la guerre civile froide" pour décrire le climat exécrable entre les différents communautés qui ne se mettent pas sur la gueule mais laissent traîner des explosifs de ci de là, en attendant une vraie bonne occasion de se retaper dessus.

Mais vous allez vous calmer un peu les gars ?

Cet après-midi, j'ai subi le dernier film de Clint Eastwood, celui où il décrit les dernières heures des troupes japonaises à Iwo Jima durant la deuxième guerre mondiale. Je dis subir, car Eastwood a réalisé des films extraordinaires, que ce soit Bridges of Madison County, Midnight in the Garden of Good and Evil, Million Dollar Baby, la liste est longue mais là, non. Plus de deux heures pour nous expliquer que les Japonais étaient gentils comme les Américains, qu'ils avaient le sens de l'honneur mais simplement qu'ils étaient dans l'autre camp... bref, l'idée qu'il existe un code de chevalerie des guerriers qui permet de les hisser du rang de la brute sauvage à celui de défenseur de la patrie, pitié... On est en 2007, je ne suis pas du tout antimilitariste et je suis heureux de savoir qu'il existe des forces armées qui nous protègent de la barbarie pure. Mais qu'on pense encore qu'il y a de la noblesse dans la guerre, et que cela excite encore les jeunes générations qui rêvent d'en découdre pour prouver leur courage, c'est déprimant.

Je vais être naïf et prétendre que je ne connais pas du tout le Moyen-orient : est-ce que cela ne profiterait pas à tous qu'il y ait la paix entre les peuples ? Est-ce que le besoin de se réfugier dans la religion et la violence n'est pas motivé par la détresse matérielle qu'on déguise sous de plus nobles motifs ? Le problème c'est que le bonheur sur terre n'est pas l'objectif de tous. L'Europe y a relativement accédé en arrachant la religion du pouvoir temporel. Les religions monothéistes promettent le paradis après la mort, à condition qu'on vive l'enfer sur terre. En refusant de croire à une vie meilleure dans l'au-delà, l'homme a réussi à transformer sa vie pour en faire parfois une quête frustrante de la félicité permanente, mais le plus souvent une prise en main responsable de sa destinée. Mais certains ont fait le choix de ne considérer leur passage sur terre que comme une expérience transitoire destinée à montrer leur loyauté à un dieu hypothétique, ce qui explique qu'ils accordent à leur existence et à celle des autres une importance minime. Même dans un Etat prétendument laïc comme la Syrie, la notion de bonheur est supplanté par l'aliénation des foules qui suivent un leader qui les mène à leur perte, faure de réaliser qu'un autre régime est possible. A force de manger de la propagande expliquant que le régime syrien est un incompris, que le voisin libanais est un ingrat et l'Israélien un cancer à éradiquer, j'imagine sans peine que le citoyen lambda en Syrie, comme dans 1984, ne parvient pas à imaginer autre chose que son quotidien misérable.

On a cru les idéologies mortes avec la chute du mur de Berlin ; elles sont au contraire vivaces comme jamais. Qu'elles s'appellent religions, baasisme ou sionisme dans sa forme de reconquête de terres "historiques", elles continuent de pourrir la vie des peuples qui n'ont pas réussi à parvenir au stade où il pourrait s'affronter sur des questions consensuelles. Je l'ai déjà dit, je le répète : je me réjouis de l'élection présidentielle française, malgré ses candidats folkloriques d'extrême-gauche, elle met aux prises deux choix de société assez semblables, deux petites options qui jouent à se faire peur avec l'ogre Le Pen. La France est peut-être vieille, usée, fatiguée et sur le déclin ; mais elle n'a plus cette maladie de jeunesse, peut-être parce qu'elle a été vaccinée en 1789 avec une piqûre de rappel en 1848, qui lui ferait résoudre ses problèmes par la violence. Espérons qu'elle aille dans le bon sens, et ne rejoigne pas le Moyen-orient qui lui continue d'avoir la rage.

Encore une preuve de cette fièvre de la punition : le blogueur égyptien Abdel Karim Suleiman a été condamné à trois ans de prison pour avoir insulté l'islam et un an pour avoir diffamé le "président". Pour avoir subi pareilles menaces jadi, sans qu'elles aient été mises à exécution, je suis marqué par le sort de ce jeune étudiant qui pour avoir cru qu'Internet était un instrument de libération, va croupir dans les geôles du pharaon, avec de vrais criminels, mais aussi avec des homosexuels dont le seul crime est d'aimer différemment. Cette peur de la différence est un symptôme d'une société bien malade. Je ne pense pas qu'en tant que Français je sois finalement si bien placé pour juger un pays comme l'Egypte. J'espère juste qu'Abdel Karim Suleiman ne sera pas oublié, et qu'une prise de conscience mondiale des blogueurs pourra faire fléchir la "justice" égyptienne. Je compte une fois de plus sur vos suggestions.

Allez, une blague pour finir, elle circule de façon virale (quand je vous parlais de vaccins....) : Les chrétiens du Liban ont deux leaders, un médecin qui n'a jamais vu de malade, et un malade qui n'a jamais vu de médecin. Je vous laisse deviner qui est qui, et j'arrête pour aujourd'hui les analogies médicales. Dans quelques années, vous pourrez les retrouver dans mes annales.

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