25 mai 2007

La Base

Dans un pays normal, on s'occupe du problème du terrorisme de la manière suivante : on capture les terroristes, on les juge et on les met en prison. A la suite de quoi les bonnes âmes et les bolchéviques font des campagnes de presse pour protester contre la façon inhumaine dont on traite ces pauvres brebis égarées, en arguant que chacun a le droit d'être bête et insouciant quand il est jeune. Mais le Liban n'est pas un pays normal. Ici, les terroristes ont le choix. Soit ils entrent au parlement en affirmant représenter la résistance, soit ils se font tuer par l'armée à coups de mortiers. Mais il y a bien un moment où les terroristes se serrent les coudes, et le chef des terroristes canal historique libanais affirme ce soir la chose suivante :

Le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah a mis en garde vendredi le gouvernement libanais contre les conséquences d'un assaut sur le camp de réfugiés de Nahr el-Bared, dans le nord du pays, où sont retranchés des militants du groupe radical Fatah al-Islam, critiquant l'aide militaire américaine à l'armée et appelant à un règlement politique.

Il a estimé que les militants du Fatah al-Islam installés dans le camp qui ont attaqué l'armée devaient être traduits en justice mais s'est opposé à toute action militaire pour y parvenir. "Nous n'accepterons ni ne fournirons de couverture ni ne serons partenaires de cela", a-t-il dit à la télévision, affirmant que sa position ne visait pas à défendre les militants du Fatah al-Islam mais à préserver l'armée.

Hassan Nasrallah a averti que le Liban risquait d'être plongé dans la guerre menée par les Etats-Unis contre Al-Qaïda. Si tel était le cas, a-t-il estimé, davantage d'islamistes radicaux pourraient arriver au Pays du Cèdre, et entraîner le risque d'une déstabilisation du pays. (AP)

Au moins six avions ont atterri dans la journée à Beyrouth, chargés de matériel militaire américain à destination des forces de sécurité libanaises contrôlées par le gouvernement. Ce que Nasrallah semble craindre, c'est que son mouvement terroriste soit le prochain sur la liste du gouvernement qu'il conteste depuis des mois sans arriver à convaincre personne d'autre que les déjà convaincus. En retour, de façon subtile mais aujourd'hui très visible, Fouad Siniora, le premier ministre soutenu notamment par les Etats-Unis et la France, a réussi à réarmer les forces militaires officielles et à leur permette une démonstration de force afin de parer aux éventuelles tentations putschistes du hezb. Du nord au sud du Liban, on pleure les soldats tombés au combat contre les forces séditieuses, et les hommages qui leur sont rendus n'omettent jamais de préciser qu'ils venaient de tous les coins du pays.

Même si la propagande s'organise contre les velléités du gouvernement et du clan Hariri, notamment en utilisant un article de Seymour Hersh qui apparaît aussi crédible que le protocole des Sages de Sion, le Liban commence malgré tout à s'organiser au-delà des clans. La méthode pour y parvenir n'est pas nouvelle ni très glorieuse ; elle est toutefois efficace. On loue l'armée, son abnégation, le modèle qu'elle représente pour l'ensemble du pays, transcendant les confessions, les appartenances claniques et les origines socialo-géographiques. Le hezbollah s'enfonce dans son isolement, personne ne pleure les terroristes, les Libanais se sentent rassurés par les forces de l'ordre qui leur ressemblent et les protègent et les Etats-Unis reprennent pied au Liban, pendant que la France envoie son charismatique ministre des Affaires Etrangères. Celui-ci, se rappelant la mésaventure de son ex-ami Jospin à Bir Zeit, n'ose tout de même pas confirmer que le nouveau président français a bien déclaré que le hezb était terroriste. Mais on peut penser qu'il agira tout de même en gardant en tête que deux armées pour un si petit pays, c'est trop.

Tout vaut mieux que le pourrissement auquel nous sommes trop habitués, même si hélas ce sont les éternels palestiniens civils qui continuent à payer un prix trop élevé pour eux. Gaby Nasr, chroniqueur du quotidien L'Orient-le jour, a eu ce trait d'esprit aujourd'hui, et pour une fois il ne l'a pas emprunté au Canard enchaîné : "Ce qui confirme le très peu connu théorème d’Abraham : sur deux Palestiniens, il y en a toujours un qui est le dissident de l’autre.". Ou alors un qui meurt de la connerie de l'autre.

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