24 mai 2007

Cancérologie

Bernard Kouchner à Beyrouth ! Je ne ferai pas de commentaires cyniques sur la présence du nouveau ministre des Affaires Etrangères au Liban, comme j'ai pu en faire pour ses deux prédécesseurs. Contrairement à Douste-Blazy, Kouchner (qui n'est pas juif, arrêtez les rumeurs) connaît son affaire, et à l'inverse de Villepin, il adopte un pragmatisme militant qui me plaît. Je pense qu'on peut compter sur lui pour ne pas aller serrer la main de Nasrallah, et qu'il saura sinon prendre des mesures adéquates, en tout cas rapporter la situation à Paris avec plus de précision que le Quai d'Orsay qui reste engoncé dans sa politique arabe et son antisionisme bon teint. Kouchner est un excellent choix en théorie comme ministre des Affaires Etrangères, et le fait qu'il réserve sa première sortie pour le Liban est un symbole bienvenu. On se doute qu'il a reçu des consignes de la part de Sarkozy, qui lui-même avait reçu, en compagnie de l'ancien président de la République française (comment s'appelait-il déjà, le grand gars sympa qui foutait rien ?), le rejeton Hariri inquiet de la future politique libanaise de la France. Mais Kouchner, s'il manque de constance en politique, PCF, puis PS, puis ministre dans un gouvernement UMP, reste sur la même trajectoire en géopolitique. Il avait critiqué l'attitude française au moment de la guerre en Irak en 2003, la jugeant "arrogante" ; je le rejoins entièrement sur ce point, on n'avait pas à traiter de haut nos alliés américains pour exorciser notre complexe d'infériorité militaire et diplomatique (même si eux-mêmes se sont comportés comme des tringles). Au moins, au Liban, la France reste un grand pays, et la visite de Kouchner est perçue comme d'importance.

Pendant ce temps, la propagande fait battre les tambours :

La direction de l’orientation de l’armée libanaise a publié hier un communiqué intitulé « Donner sa vie pour le Liban », dans lequel elle a soulevé que « l’armée a montré, une fois de plus, la solidité de sa loyauté » et l’ampleur « de son abnégation » pour « la liberté du pays et sa souveraineté ». « À l’heure où l’armée se déploie sur l’ensemble du territoire libanais, et que sa mission consiste à défendre les frontières du Sud, à surveiller les frontières terrestres et maritimes et préserver la paix et la stabilité à l’intérieur du territoire, et à la veille de la fête de la Résistance et de la Libération, symbole de la victoire de la volonté nationale sur la barbarie de l’ennemi israélien (...), la main de la traîtrise a pris pour cible de manière soudaine les positions de l’armée dans la région du Nord », a ainsi indiqué le communiqué.

C'est creux comme un discours de politicien libanais. J'aime particulièrement "victoire de la volonté nationale sur la barbarie de l’ennemi israélien". Autant le hezb est un groupe terroriste qu'il faut extraire au plus vite, une tumeur cancéreuse, (Dr. Kouchner, scalpel ?), autant ce sont les seuls à s'être battus durant la guerre de juillet 2006. Le Liban n'a pas été très uni à cette période, il l'est encore moins maintenant. Et parler de "main de la traîtrise au lieu d'évoquer directement Damas, ce n'est pas très courageux. Pas plus que de pilonner des civils d'ailleurs. Il faut évidemment rendre hommage aux soldats morts pour la patrie, mais au final, c'est leur métier. Je suis cynique ? Pas plus que l'armée qui s'apprête à commémorer la Résistance (laquelle) et la Libération (de qui ?).

Aujourd'hui a été un jour sans bombe. Tout le monde avait pourtant parié sur le prochain quartier qui serait déchiré dans la nuit. C'est pire que le supplice chinois de la goutte d'eau : on devient soulagé lorsque la bombe éclate parce qu'on n'en pouvait plus d'attendre. J'écris désormais mes posts après minuit, pour être sûr de ne pas rater la dernière attaque terroriste. Curieux comme on s'adapte à tout, les coupures d'eau, d'électricité, les routes défoncées, les attaques terroristes ou les rumeurs terrifiantes. On a notamment murmuré que les supermarchés étaient pris d'assaut ; évidemment, en faisant mes courses, j'ai dû croiser trois personnes parmi des rayonnages pleins à craquer. En revanche, j'ai pu acquérir le "dernier" Courrier International qui date du 16 mai. J'avais reçu un comment d'un de ses rédacteurs il y a quelques temps me disant qu'il me lisait. Voici la preuve que je le lis également, mais comme vous pouvez le constater, la censure libanaise est passée par là, et a caviardé le nom d'un journal licencieux. Lecteur futé, sauras-tu retrouver le nom de cette publication et pourquoi on a pudiquement biffé sa description ?

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