Anno Domini
Au Liban, un coup de vent est littéralement suffisant pour mettre le pays par terre. Depuis hier, Zéphyr s'agite, souffle à n'en plus finir, ce qui a pour effet d'arrêter l'électricité (?!), conduit à bloquer les générateurs, et donc pendant de longues périodes sans courant électrique plus d'Internet, plus de télé, plus de lumière, plus rien. La prochaine fois qu'Israël veut attaquer le pays, mon conseil, pas besoin de balancer des tonnes de bombes, il suffit de retourner les avions, et de pointer les réacteurs vers le Liban. Le souffle d'air sera suffisant pour tout bloquer, c'est pas cher et c'est très écologique. Qu'ils attendent aussi qu'ils pleuvent parce que là en plus les routes deviennent presque impratiquables, donc plus n'est besoin de couper les infrastructures routières à coups de roquettes. Tous ces conseils et bien d'autres dans mon prochain livre cosigné avec Nicolas Hulot "Vers une guerre écologique - les morts seront en bonne santé (merci Jean Leloup)".
Reconnaissez sinon que cette élection fait le bonheur de tous : la droite a triomphé, et la gauche revient dans son rôle rassurant de critique à l'égard du pouvoir dont elle s'est toujours méfié. Etre dans l'opposition, c'est quand même confortable et ça permet d'être du bon côté, celui qui ne fait pas d'erreurs puisqu'il ne fait rien. A voir l'hystérie de Libé.fr et des commentaires laissés par les "libénautes" après chaque article consacré aux vacances de Nicolas Sarkozy, on se dit que le plus grand drame du petit peuple de gauche aurait été de récupérer la présidence 12 ans après Tonton. Je pense que Ségolène Royal était la seule qui y croyait vraiment, son fils Thomas aussi peut-être, celui qui n'a pas encore mué. Les autres au PS, surtout devant l'avalanche de reportages montrant les dessous de la campagne, semblent avoir abandonné dès qu'il a été clair que ce serait une gonzesse qui porterait l'étendard. Le syndrome Jeanne d'Arc chez les socialistes, pas leur truc, c'est plutôt la figure du patriarche qui fonctionne. Rocard devrait se laisser pousser la barbe, sur un malentendu, ça peut marcher.
Bayrou continue à s'installer dans cette critique de tout si confortable en politique, comme dans la vraie vie. Quiconque a dû un jour assumer des responsabilités sait que jouer au chef n'amène que des ennuis. En revanche, faire le martyr n'apporte que des bienfaits. Plus les députés UDF, derviches tourneurs de formation, s'éloignent de lui, plus Bayrou rayonne : avec un peu de chance, il ne sera même pas élu en juin et sera complètement banni de la vie politique nationale. L'occasion pour lui de parcourir les médias pour dire qu'on ne l'y trouve jamais, et de continuer son néo-poujadisme électoral : après l'abolition de l'ENA et le "tous pourris", quel slogan de Pierre Poujade va-t-il reprendre ? Je ne vois que la défense des petits commerces et de l'artisanat qui n'a pas été intégré par Sarkozy. Et j'imagine bien Lou Bayrou un crayon sur l'oreille pour montrer qu'il comprend cette France des petites gens qui ont bien du mal contre les vilains supermarchés.
Ou alors, il pourrait coacher les jeunes. Quand on voit ce qui s'est passé à Tolbiac, on se dit que nos étudiants, malades d'avoir loupé Mai 68 et exultant d'avoir un président qui crache sur cette époque hédoniste, ces jeunes pleins de foutre et d'hormones disais-je, auraient bien besoin d'un leader charismatique, ou en tout cas d'un politicien expérimenté. Mes petits, on ne fait pas la grève et on n'occupe pas son établissement en raison de mesures que le pouvoir POURRAIT prendre. On attend qu'il les envisage et là, on saccage son outil de travail avec des pavés payés par les impôts de papa et maman. On pouvait croire que les étudiants seraient alarmés par les classements internationaux qui montrent la faiblesse de l'université française dans le monde. On aurait imaginé qu'ils auraient compris que le moment est venu de changer, et de ne plus se reposer sur l'image d'une Sorbonne sur T-shirt pour touristes japonais. Au lieu de ça, ils vont défendre une université qui s'écroule, minée par les mandarins, le manque de moyens par rapport aux grandes écoles et l'inadéquation totale avec le monde du travail, sans parler de l'inanité de l'agreg ou de la CNU. Au final, je trouve que Nicolas Sarkozy est le meilleur cadeau qu'on ait pu faire à ces jeunes désoeuvrés qui ont parfois tant de mal à trouver un symbole réac du monde adulte entre deux parties de PSP et une discussion sur l'avenir du bolchévisme (Attention ! Etudiant qui me lit, je ne parle pas forcément de toi, mais de tous les petits branleurs qui tentent d'intégrer la direction des partis de gauche et d'extrême gauche en foutant le bordel à la fac, donc pas de comment acnéique pour défendre ton UFR de province où les jours coulent heureux à l'ombre des platanes) : on verra bientôt fleurir les portraits de not' président avec une moustache à la Hitler, et les slogans des années Cohn-Bendit vont refleurir à l'approche des examens. Et tout le monde sera content, je vous dis.