10 décembre 2006

Post racoleur

Les deux vainqueurs potentiels de l'élection présidentielle française rivalisent de courage en ce qui concerne le Moyen-Orient. Ségolène Royal, pour faire oublier son faux pas avec le Hezbollah, déclare que, concernant l'Iran, "on ne pourra pas dire qu'on ne savait pas" et s'oppose au programme nucléaire iranien. Pour ne pas être en reste et tacler encore un peu sa rivale, Nicolas Sarkozy ose une comparaison très bien acceptée sur ce blog entre l'élection des représentants du Hezbollah et celle des nazis en Allemagne en 1933. Une fois de plus, le Moyen-Orient, de par sa proximité géographique mais aussi de par sa capacité à translater les enjeux français, est au coeur de la campagne. Si les candidats parlaient du Darfour, ou d'un autre massacre tranquillement mené mais à l'abri des médias, il y a fort à parier que leurs propos ne seraient que peu relayés. Dans le cas du Moyen-Orient, fascinant Moyen-Orient, Moyen-Orient complexe, on peut jouer à plein sur le fantasme de ce creuset de violence et de civilisation et se positionner avec fermeté sur des enjeux qui finalement, n'auront que peu d'incidence sur l'élection du champion des Français.

Bien sûr, je suis heureux que les Français s'intéressent au Liban, et comment ! Ce blog n'a pas d'autre utilité que de rappeler jusqu'à épuisement les risques qu'un Liban déstabilisé ferait courir au reste du monde. A l'heure où j'écris, des hordes de bus portant drapeaux jaunes (Hezbollah), orange (Aoun) ou verts (maradas) descendent en piqué sur Beyrouth pour bien montrer que ce gouvernement est illégal, en oubliant que le président lui-même est parfaitement illégal, tout comme les armes du Hezbollah et ses moyens de financement. Je trouve curieux cette alliance contre-nature entre supporters d'un mouvement ultra religieux terroriste anti-libanais et adeptes d'un courant qui prône la déconfessionalisation et la normalisation des liens entre le Liban et ses voisins. J'ai bon espoir qu'un matin, les aounistes vont se réveiller et s'apercevoir de leur erreur, mais ça me semble assez mal parti devant la ferveur de la kermesse qui s'annonce. Aoun a encore une chance d'apparaître comme un leader convenable, avant d'être balayé par son pacte diabolique.

Personne n'a le monopole de la vertu en politique, mais j'ai tendance à me méfier lorsque je vois le parti communiste libanais s'allier avec le Hezbollah. Toutefois, la stratégie des partis communistes de s'allier avec leur pire ennemi reste une constante du XXe siècle. J'avais évoqué le pacte germano-soviétique, que les nostalgiques de l'URSS se gardent bien d'évoquer pour préserver leur légende de résistance au fascisme. Le Monde relate un autre aspect méconnu et sûrement honteux des rapports entre le PCF et l'Allemagne nazie, où l'on voit que l'antisémitisme n'est pas l'apanage des fascistes. Ce qui explique peut-être encore mieux l'alliance au Liban entre le Hezbollah et le PC, celui-ci n'ayant peut-être toujours pas digéré la trahison d'Israël qui est passé de pays socialiste à allié inconditionnel des Etats-Unis au cours du XXe siècle.

Du côté des démocrates français, Ségolène et Sarko sont bien inspirés de parler du Moyen-Orient. Je comprends que la candidate socialiste ait préféré éviter un caillassage, comme avait subi Lionel Jospin, en restant diplomate avec le Hezbollah. Quant à Nicolas Sarkozy, j'espère qu'il conservera la même attitude rigide vis-à-vis du parti de dieu s'il venait à être élu. J'espère également que la surenchère de fermeté continuera, et que si l'un des deux parvenait à la présidence, la France adoptera une politique claire au Moyen-Orient, en évitant de vexer systématiquement Israël et en soutenant les démocrates au Liban et ailleurs. Vous me trouverez peut-être clientéliste mais mon bulletin de vote dépendra largement du programme consacré au Moyen-Orient de chaque candidat. En même temps, si une bonne politique étrangère peut éviter des attentats en France : alors Ségo ou Sarko ?

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