27 septembre 2006

Coup de sens

Deux grandes nouvelles dans un Liban calme avant la tempête : Ghassan Tuéni sera l'un des candidats au prix Sakharov, décerné par le parlement européen à un défenseur des droits de l'homme. Au Liban, tout le monde est content, sauf que c'est pas gagné. Tuéni (qui, si on me le demande, mérite largement son prix et même plus) sera "opposé" à deux autres compétiteurs :

La candidature d’Ingrid Betancourt, otage des guérilleros des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), a été présentée par une députée socialiste française. Celle d’Alexandre Milinkevitch a été proposée par des groupes de droite et celle de M. Ghassan Tuéni a été proposée par des groupes de gauche européens.

Passons sur la candidature pipolo-fantaisiste de Betancourt certainement soufflée par Villepin. On dit que le Liban est bordélique à cause de son mélange de religion et de politique, mais comment en est-on arrivés à la conclusion que Tuéni serait un candidat "de gauche" ? Sachant que Tuéni est grec-orthodoxe, donc chrétien, et que les chrétiens se font régulièrement traiter de gens de droite, voire de fachos par les incompétents, comment le Parlement européen et ses divisions droite-gauche aussi ineptes qu'archaïques en sont arrivés à le nommer candidat de la gauche ? Dommage, le seul qui aurait pu nous l'expliquer, le représentant de l'Union européenne Patrick Renauld, quitte le Liban. Rien de personnel, mais c'est pas dommage, il était bien illuminé. Vous me direz que le prochain pourra l'être tout autant ou plus, je dirais que c'est la fonction qui veut ça. Représenter une organisation politique qui n'existe pas demande des trésors d'inventivité. Ou un passage intensif chez les Jésuites.

La Francophonie n'existe pas non plus, mais le Liban n'y enverra qu'un ministre car le président du Liban est vexé de n'y être point convié.

« Le Liban ne sera pas représenté au sommet de la francophonie (Bucarest - 28 et 29 septembre), car il n’y a pas été invité », a affirmé hier le chef de l’État, le général Émile Lahoud, qui a reproché au président roumain Traian Basescu d’avoir cédé aux pressions « exercées directement par le président français Jacques Chirac », et adressé son invitation au sommet au Premier ministre. Or, souligne un communiqué de la présidence, « selon la Constitution libanaise, l’invitation doit être adressée au président de la République ».

La Francophonie est censée constituer un espace de dialogue où les peuples utilisent une langue commune pour échanger. En théorie. En pratique, la Francophonie reste un espace politique, un sous-Commonwealth, d'où le Liban s'est longuement vanté d'avoir fait interdire Israël, pourtant plus francophone que le pays de Lahoud. Ce genre d'accrocs montre bien que la France fait ce qu'elle veut de la Francophonie et que ceux qui ne s'y plient pas sont punis. J'ai l'air de défendre Lahoud mais je me marre : son français est atroce et monter sur ses ergots est pour lui une occasion de détourner l'attention du peuple sur autre chose que les véritables problèmes du Liban.

Car pendant ce temps le Hezbollah et ses "20 000" roquettes plastronnent et représentent de plus en plus un Liban déterminé. Tiens, d'une pierre deux coups comme disait Arafat : donner le prix Sakharov à Nasrallah qui le confondra avec Molotov et l'acceptera donc avec le sourire, puis auréolé de cette récompense, l'envoyer au sommet de la francophonie. Grâce à WIL, toute casserole à son couvercle, et tout problème à sa solution. Je vous laisse, je vais résoudre le problème de violence des banlieues françaises en leur montrant l'exemple de Zinedine Zidane.

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