The Truth about Wang Laboratories
En France comme au Liban, mes voisins sont des connards de la pire espèce. Dans les deux cas, des familles nombreuses, je n'arrive pas à compter les enfants tellement ils s'agitent, dans les deux cas la mère reste au foyer à faire je ne sais quoi (ha si, en France du piano et au Liban, elle prie Jésus), dans les deux cas le mari se la pète parce qu'il gagne de l'argent et a une grosse voiture, bref, des connards. La dernière preuve du connarisme de mon voisin : cette nuit, il a trouvé le moyen de faire descendre par le concierge les gravats des travaux de son balcon en utilisant l'ascenseur à MINUIT. Il n'a même pas cherché à nier quand je lui suis tombé dessus, méthode du fourbe habituelle, il a fait son grand sourire de con qui fait ce qu'il veut quand il veut et pis c'est comme ça. Ce qu'il ne sait pas, c'est que j'ai l'intention de lui péter la gueule la veille de mon départ définitif du Liban, mais ça c'est pas pour demain.
Donc, mes voisins sont des cons, ce que chacun sait puisque personne n'aime ses voisins, surtout pas les Libanais qui détestent les leurs. Quelle ne fut ma surprise donc en voyant par la fenêtre de mon balcon (l'autre, pas celui qui a vue sur la mer...) un énorme drapeau français trôner sur le toit de l'immeuble d'en face. Au début, j'ai cru rêver, on n'est pas trop habitués à voir des hommages à la France dans un pays qui s'affirme pourtant francophone. Etre français au Liban, c'est pire que tout, ce n'est pas exotique vu qu'il y a plein de Libanais qui ont le passeport, ce n'est pas bienvenu style italien toujours heureux pourvu qu'il ait de l'amour et du vin, ce n'est pas détesté comme les Américains, c'est médiocre d'être français à l'étranger. Alors un énorme drapeau comme ça, qui claque fièrement au vent !
Et puis bien sûr j'ai compris que c'était pour la C o u p e du M o n d e de f o o t b a l l, et pendant deux secondes je me suis dit, ouais, enfin des supporters de la France, allez C i s s é, allez Z i d a n e !
J'ai eu peur. Se mette à soutenir ce jeu de milliardaires drogués qui provoquent l'hystérie des foules nationalistes, même pour deux secondes... Si les jeunes crachent sur les profs, c'est aussi parce qu'il rejette l'éducation qui ne sert à rien puisqu'ils peuvent gagner des millions comme leurs idoles de la S t a r A c' ou du sport le plus débile de la planète.
Alors ça m'a fait plaisir de lire cette bande dessinée, très bien faite, émouvante, et gratuite dans un monde où on va commencer à payer l'air et l'eau. C'est l'histoire d'un prof qui parle de son remplacement dans une classe difficile, et ça permet aussi de rappeler que toutes les saloperies qu'on raconte sur les fonctionnaires (ces fainéants que Villepin insulte en permanence et pas plus tard que le 12 mai dernier) ne concernent qu'une petite et triste minorité. Il reste des gens qui croient à leur vocation d'enseignement, et d'avance je les plains à l'approche du rendez-vous de tout ce que la mondialisation, le sport et la compétition à mort peuvent apporter d'immonde à la planète. J'espère donc de tout mon coeur que la France perdra le plus vite possible, quitte à ne plus avoir de drapeaux français en face de moi quand je travaille.