Quex
Je n'ai pas accès à des sources intimes du pouvoir ou à des mémos consécutifs à des dîners en ville, mais il était clair que quelque chose se préparait pour dimanche dernier, ce qui explique en partie que j'ai décollé hors du Liban dès samedi. Quelque chose se préparait donc, mais quoi ? Il devient de plus en plus évident que Nasrallah continue à développer sa propagande à la manière des nazis en 1930 et les évènements meurtriers d'hier nous le confirment. En poussant ses brebis à protester violemment contre les coupures de courant, le hezb emploie un procédé populiste grossier, mais qui lui permet de montrer qu'il s'adresse d'abord aux petites gens, aux sans-grade. Il y a de fortes chances qu'aucun des manifestants n'aient réellement à payer son électricité, mais pointer une des faiblesses les plus évidentes et les plus aberrantes du pouvoir en place permet de relancer le bras de fer entre ceux du 8 et ceusses du 14. L'ancien ministre chargé de l'énergie était pourtant un sbire du sayyed, mais la contradiction n'a jamais fait peur au hezb : la communauté chiite a été la principale contributrice de l'Armée du Liban-Sud et la communauté représentant la résistance dans le même mouvement.
Le fait que plusieurs manifestants soient tombés sous les balles des "forces de l'ordre" est une aubaine atroce pour le hezb, qui en fera des martyrs, comme pour Amal, qui revient un peu dans le jeu de la rue. On peut être sûr que les enterrements des chahids seront noyés dans les larmes de colère du petit peuple injustement exploité par la racaille du 14 mars, ploutocrates affameurs qui méritent le même sort que l'aristocratie française en 1789. Aoun se fera un devoir de rappeler qu'un tel bordel n'existerait pas s'il avait les manettes, ce qui n'est pas faux vu qu'au bout d'une centaine de morts, les manifestants se seraient vite dispersés devant les méthodes douces bien connues du général orange secoué. Les forces démocratiques de la majorité vont se retrouver plus qu'embarrassées, ayant été forcées d'ordonner de tirer sur la foule pour éviter que d'autres manifestants ne continuent à utiliser leurs RPG et donc confrontées au douloureux dilemme du pouvoir consistant à en sacrifier un pour le reste de la communauté.
Pendant ce temps, le reste du monde contemple la bêtise libanaise et ne sait que faire pour éviter l'inéluctable. Lorsqu'en 1938 on avait cru se passer de guerre avec Hitler en lui concédant le rang d'interlocuteur démocratique, on aurait été avisé de se rappeler que pour dîner avec le diable, il faut une grande cuillère. Aujourd'hui, le hezb vomit la démocratie, comme les nazis dans les années 30. Mais c'est un moyen d'accéder au pouvoir afin de détruire de l'intérieur ce qui a permis de devenir le chef. Le hezb va continuer les provocations dans la rue, y laissant de nombreux hommes trop heureux de donner leurs misérables vies pour ce qu'ils pensent un dessein divin. La raison par la souffrance va remplacer la raison, et la position de ceux qui tentent de maintenir l'ordre sera de plus en plus intenable à mesure que seront tués les "fils de la révolution". Les mouvements fascistes arrivent par les urnes, le hezb ne fera pas exception et prépare déjà sa campagne avec ses Hitlerjugend trop heureux d'obtenir une place dans une histoire où pour surnager, il faudra flotter sur le sang.
Et il sera bientôt trop tard.