30 août 2006

Bonne facture

Alors que chacun attend ce qui va se passer dans les jours ou les semaines qui viennent, j'ai de plus en plus l'impression que ce que les Libanais ne voulaient surtout pas est en train de se réaliser : on est en train de décider de l'avenir de leur pays sans eux. Les divisions soi-disant entre communautés et les allégeances qui à la Syrie et à l'Iran, qui à l'Occident ont bien sûr montré que le pays est divisé, si besoin était. La décision d'un seul parti de faire la guerre au nom de l'Etat, même s'il semble que son chef le regrette, a également prouvé qu'il n'y a pas d'unité nationale. Les revirements des chefs de clan, passant d'un pro à un anti syrianisme forcené, n'ont pas aidé à comprendre la clarté du destin libanais. L'illusion partagée par tout un peuple que l'on peut être en guerre permanente, ouverte ou larvée, avec ses puissants voisins, n'a pas encouragé l'idée d'un avenir pacifique dans la région. Et la théorie que chaque poste à tous les niveaux de la gestion du pays doive être défini par l'appartenance à une religion brouille encore plus le besoin d'un Etat moderne.

Donc, aujourd'hui, les Libanais ne décident plus de leur sort. La difficulté de les inclure dans une discussion sur leur avenir provient aussi qu'il est impossible de choisir une seule personne, comme le président ou le premier ministre, qui représenterait le pays lors de réunions avec les instances internationales. Pour être sûr que tout le monde soit représenté, il faudrait que viennent Lahoud, pour la Syrie, Siniora pour le Liban, Joumblatt pour les druzes, Nasrallah pour le Hezbollah, Sfeir pour les maronites, Hariri pour les sunnites et le 14 mars, Aoun pour son courant, et Berri qui refuserait d'être mis de côté. Ces hommes (évidemment, pas une femme...) se détestent, seraient incapables de discuter calmement, et encore, on trouverait mille hommes politiques ou religieux qui estimeraient devoir également participer à une discussion sur l'avenir du Liban.

Donc, le Liban n'a pas de réprésentant, ou plutôt il en a trop tant le pays ne se voit pas d'avenir commun avec tous ses membres. Donc, on discute de son destin sans lui. Donc, des milliers de Libanais ne reviendront pas, et des milliers de jeunes préféreront émigrer vers des terres plus sécurisantes.

Alors Nasrallah aura vraiment gagné, et lui et ses acolytes iraniens pourront continuer tranquillement leur travail de dédémocratisation du Moyen-Orient.

Et un jour, nous, l'Occident, on le paiera. Cher, mais cash.

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