Courrier des lecteurs : le retour
Dabbelby m’écrit à propos de l’élection présidentielle, qu’on pourrait nommer avec plus de précision la « désignation présidentielle », tant il est vrai que la Syrie joue un rôle primordial dans ce processus démocratique. Je ne m’étends pas dessus, car le procédé est écrit d’avance, obéissant aux règles complexes des réseaux d’influence. Le candidat retenu sera aux ordres du puissant voisin de l’est et n’aura évidemment pas de velléités à mordre la main qui le nourrit. Mon lecteur, que je remercie pour sa contribution, continue en ces termes à propos du Liban :
…Pour moi qui suis français, le Liban représentait bien cette part d’occident, de modernité qui, sous la botte stérilisante, démoralisante des Syriens, s’éteint peu à peu. Ce pays est en train de disparaître sans que personne ne s’en soucie. Tu pourras dire ce que tu veux de Bush, mais il est le seul à demander clairement aux Syriens de dégager. Peu importe les raisons qui le poussent à faire ça, mais l’indifférence des occidentaux m’est insupportable. Même la France proteste mollement, après avoir été sa génitrice, comme le rappelle si justement Mlle X, la franco-libanaise…
Entièrement d’accord ! Et je tiens à rappeler dans ce blog ce que j’ai toujours écrit, je ne voterais certainement pas Bush si j’étais américain, mais je commence à trouver lassant les tombereaux d’injures qu’on lui déverse dessus en permanence. D’autres que lui les mériteraient amplement mais sont curieusement épargnés. Est-ce parce que Berlusconi est plus riche, ou son pays moins puissant qu’il a un tel traitement de faveur dans les médias par rapport à son ami texan ?
C’est vrai, et Dabbelby a raison de le souligner, que les Américains, quelles que soient leurs motivations, s’investissent au Moyen-Orient, ce qui n’est pas le cas des Européens, et surtout pas des Français. La stratégie diplomatique française (qui changera peut-être avec Michel Barnier) consiste à rester proches des pires dictatures pour soi-disant les amener sur le chemin de la démocratie : Chine, Maroc, Syrie, la liste est longue des amitiés particulières que la France entretient avec des régimes infâmes qui sont ravis de cette proximité qui les légitimisent. C’est un jeu dangereux que nous pratiquons dans cette partie du monde, et je doute que les extrémistes de tous poils fassent la différence entre les Américains et les Européens lorsqu’il s’agit d’attaquer une civilisation qui ne pense pas comme eux. Ce que je crois toutefois, c’est que ce n’est pas la chrétienté qui affronte l’Islam, que toutes les religions poussées à l’extrême sont dangereuses, et qu’il s’agit plutôt d’un combat entre nous et les illuminés qui veulent faire régresser l’humanité à une époque où la femme doit porter le voile, ne peut pas accéder aux plus hautes postes dans la société civile et religieuse et où l’homme doit vivre dans la crainte de Dieu en attendant des jours meilleurs. Je vomis les sermonneurs qui prétendent parler au nom d’une autorité dont ils ont inventé l’existence. Chacun peut vivre en paix dans ce Moyen-Orient agité, mais il faudrait pour cela oublier un peu les dieux guerriers.
Au risque de choquer les Européens bien-pensants, j’applaudis la démarche américaine au Liban, tenace bien qu’amicale, et je ne désespère pas que ce grand pays qui en a libéré bien d’autres au cours de son histoire ne débloque un jour la situation au Liban. Le débat reste ouvert sur l’Irak, mais à l’heure où nous célébrons la libération de la France par les Etats-Unis, je pense qu’il serait indiqué d’adopter une attitude moins anti-américaine primaire, sans perdre de vue que George W. Bush n’est effectivement peut-être pas le meilleur président possible.