27 juin 2006

Le dernier post sur la politique libanaise

Pas facile de recommencer à bloguer, la situation au Liban n'est pas vraiment une inspiration pour l'intelligence. Le récent scandale ? Emile Lahoud, président du Liban reconduit par la Syrie, n'a pas été convié au sommet de la francophonie qui se tiendra en Roumanie. Chacun au Liban y voit la main de la France, ce qui paraît plutôt logique, mais les commentaires que l'on peut entendre montre le fossé qui sépare l'Europe et le Moyen-Orient. Car certains murmurent que si Lahoud n'est pas invité, alors que Fouad Siniora, le premier ministre, est convié, c'est parce que la France "lâche les maronites pour les sunnites".

(soupir)

Tout dans ce pays, par ailleurs charmant et plein d'intérêts pour l'Occidental en exil, s'explique au final par l'appartenance religieuse qui définit quasiment un destin du berceau (baptême) à la mort (saints sacrements) en passant par les grandes étapes comme le mariage. En France, nous n'avons pas cette vision. J'en suis très, très heureux, ce qui ne veut pas dire que je cherche à l'imposer aux autres. Il n'empêche que séparer la religion du politique, considérer que nos hommes politiques ne participent pas du domaine divin, et que l'ont peut postuler aux principaux postes de responsabilité de la France sans considération de croyances, c'est une très bonne chose. Notre République n'est pas parfaite, seulement 13% de femmes à l'Assemblée Nationale et une surreprésentation d'hommes blancs dans les principaux secteurs de décision, c'est médiocre, je vous l'accorde. La France a encore beaucoup à faire, et ne peut pas servir de modèle. Elle pourrait en revanche constituer un exemple, et on peut toujours considérer qu'elle engrange des réussites, comme elle possède des défauts. Au final, c'est un pays où il existe des tabous (le service public, notamment), mais où la liberté d'expression n'est pas polluée par des considérations claniques.

Alors la France qui "lâche les maronites pour les sunnites", c'est bien sûr faux, parfaitement idiot, mais aussi ça montre l'incompréhension totale qui existe entre nos deux civilisations. Un Libanais qui reste dix ans à Paris ne sera jamais laïc, un Français résidant dix ans au Liban n'ira jamais à l'Eglise. Faut-il s'en désoler ? C'est en tout cas une preuve de plus que la mondialisation tant redoutée n'a que peu d'influence, et que les Libanais achètent des 4X4 et des portables comme dans les films hollywoodiens, mais qu'ils savent conserver leurs traditions (parfois de façon splendide, comme lors du mariage de Madame, qui restera dans les annales comme les noces réussies entre l'Orient et l'Occident, dans tous les sens du terme).

Au final, devant mon incompréhension de ce phénomène qui conduit à voir la main des dieux partout (et devant les trolls que je reçois parfois dans mes comments), je pense qu'il vaut mieux que je m'abstienne à l'avenir d'évoquer la situation politique du pays. Les Libanais ne seront de toute façon jamais d'accord, et argumenteront sans fin, et je crois que les autres s'en foutent. Le Liban intéresse peu de monde, ce qui est dommage, mais en même temps la seule chose sur laquelle tous les Libanais s'entendent, c'est qu'ils n'ont besoin et ne veulent l'aide de personne, voulant nouer des relations d'égal à égal avec les autres pays, et non pas des liens de dominant-dominé. C'est une lapalissade, mais pour créer des liens entre égaux, il faut l'être, égal. Et le Liban demeure le pays le plus fragile de la région, malgré les rodomontades du Hezbollah et les déclarations fracassantes des hommes politiques qui sont prêts à écraser militairement tous les voisins, celui de l'est comme celui du sud, et plus s'il le faut.

C'est difficile de voir quelque chose que l'on aime se détruire petit à petit. Mais quand on n'y peut rien, il vaut mieux passer à autre chose. J'ai envie de souhaiter bon courage au Liban, qui le mérite, mais qui refuse le vieux proverbe "aide-toi, le ciel t'aidera". Ici, le ciel est divisé en clans, et chacun soupçonne l'autre de vouloir lui cacher son soleil.

Pendant ce temps, Beyrouth devient la 32ème ville la plus chère du monde, et les voitures continuent d'arborer avec fougue leurs oriflammes du ballon rond. Et Chirac, après sa prestation surréaliste d'hier soir à la télé, se demande s'il ne devrait pas lâcher les Libanais, sans considération de religion aucune, mais parce qu'il en a un peu marre.

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