25 juin 2008

Tango avec le Che (air connu)

Je suis abonné à un site de "ventes privées" qui, s'il ne me permet pas forcément de faire des économies, m'offre la possibilité de connaître de nouvelles marques, quelle joie. Quel plaisir aujourd'hui de m'apercevoir que je peux m'offrir, pour la rentrée des classes, une panoplie complète siglée Che Guevara ! Je ne sais pas si je dois me réjouir (le fascisme rouge avalé par le capitalisme, hahaha !) ou m'inquiéter : combien d'enfants ou d'adolescents vont-ils se balader avec le vilain barbu sur leur cartable, trousse ou Nintendo DS sans savoir qu'il s'agit d'un fou dangereux ? D'un autre côté, ça ouvre des perspectives : quelle sera la marque qui, la première, aura le courage de procurer pour les fournitures scolaires de nos chers petits une effigie du Maréchal Aoun, du Docteur Geagea ou du Sayyed ? Je me demande d'ailleurs si ce n'est pas déjà fait, vu les cultes de la personnalité qu'on peut rencontrer partout au Liban.

C'est que je reviens d'une séance de cinéma peu commune où j'ai pu enfin voir "Waltz with Bachir" : l'un des protagonistes israéliens du film émet cette réflexion concernant les Phalangistes en 1982 et leur culte de Bachir Gemayel, apposant son portait partout, "comme David Bowie pour nous". Ce film est non seulement une réussite magistrale d'un point de vue esthétique, mais aussi un élément considérable à ajouter à notre connaissance de la région et de son histoire. L'auteur tente de se rappeler de ses années dans l'armée israélienne lors de l'invasion du Liban/Paix en Galilée. Au travers de témoignages de frères d'armes, on parvient en même temps que le narrateur à recomposer l'image d'une guerre du point de vue des Israéliens qui la dépeignent comme un cauchemar absolu, bien loin de l'armée invincible que peut représenter "Tsahal". Les soldats israéliens vomissent avant la bataille ou rentrent en transe pendant qu'on les canarde, les officiers supérieurs regardent des pornos allemands dans une maison libanaise qu'ils ont occupés, les chiens des Palestiniens sont exécutés pour éviter qu'ils ne donnent l'alerte, les Phalangistes exhibent leur "prince charmant" et des bocaux de formol contenant des morceaux de leurs ennemis comme des talismans magiques, et l'ennemi qui tire sur les jeunes appelés juifs ne montre jamais son visage. 

Ce film ne sera jamais montré au Liban pour des raisons évidentes, et c'est bien dommage. Car une fois de plus, Israël montre sa capacité à fournir sa version de l'histoire d'une façon remarquable et d'une grande honnêteté. Il serait bon que les Libanais, ou dans ce cas-là, les Palestiniens racontent leur vision de leur Histoire au monde, plutôt qu'on ne le fasse pour eux. Lors du dernier festival de Cannes, un film libanais se trouvait également dans la sélection, mais pas dans la même catégorie que "... Bachir". Réalisés par des Libanais exilés en France qui n'ont jamais connu ni la guerre de 1976-90, ni le conflit de juillet 2006, il n'a intéressé personne malgré la présence de Catherine Deneuve qui philosophait sur les blessures du pays du cèdre. Qui s'intéresse à la vision de gens qui n'ont rien vu ? Pendant ce temps, ceux qui ont vécu ces traumatismes au Liban ne veulent pas en parler, la situation actuelle n'étant toujours pas résolue. Je plaide pour que les Libanais prennent des caméras, pas des armes, et fassent des films sur leur pays, sans attendre qu'on le fasse pour eux. Prendre son destin en main passe par la maîtrise de son histoire. "Waltz with Bachir" est un formidable documentaire presque onirique. On aimerait son pendant libanais. Et vite.

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17 juin 2008

RIP WIL

C'est fait. J'ai quitté le Liban après douze ans de bons et loyaux services. A force de répéter que j'allais partir, on avait fini par croire que ça n'arriverait jamais, que j'étais trop ancré dans le pays malgré ses défauts pour le laisser, que je renoncerais au dernier moment.

Et puis samedi matin, j'ai pris l'avion. Aller simple de Beyrouth à Bratislava via Rome et Vienne.

La veille, il y a eu des larmes, des promesses, des hugs et beaucoup de pourquois. Je me suis tout à coup rendu compte notamment à quel point j'aimais mon métier, et que j'avais appris au fil des ans à bien l'exercer. Je laisse "derrière" moi de nombreuses amitiés mais je ne doute pas un instant de leur solidité. Et puis le Liban, j'y reviendrai. Et rien n'empêche d'arrêter d'en parler ici sous prétexte que je n'y habite plus.

Alors quid de l'avenir de ce blog ? Mes amis, je l'avoue, j'en ai besoin de ce blog. J'ai besoin de  pouvoir y discuter dans un espace convivial et ouvert (même si on peut virer sans ménagement le troll égaré) d'un peu de tout, avec un thème général plutôt vague, qui se précisera à l'avenir ou non. Alors je ne ferme pas WIL parce que je vais habiter en Slovaquie. La fenêtre n'a pas besoin d'être au Liban pour rester ouverte sur le monde. Le titre ne change pas parce que c'est toujours le même tenancier. Et on continue comme avant, avec en plus l'Europe centrale à explorer. Et croyez-moi, pour ce que j'en ai vu, ça vaut le coup d'oeil comme le post occasionnel. Qui m'aime me suive.

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06 juin 2008

Hillary pour la dernière fois

Commençons par féliciter le grand vainqueur de la course présidentielle américaine. On connaît le penchant pour les blagues sur les Français de John McCain et on peut douter du renouvellement des générations avec son arrivée à la Maison blanche, mais un homme qui est né à Coco Solo ne peut pas être tout à fait mauvais. L'homme n'est pas un doctrinaire, ni un tendre, espérons juste un pragmatique avec un peu de suite dans les idées. Je dis ça parce que, ne pouvant voter aux USA (évidemment j'aurai choisi Hillary Clinton rien que pour permettre à Bill de faire des cochonneries dans le bureau ovale), je suis quand même directement concerné par l'avènement de son nouveau leader. Je me permets donc d'avoir un avis sur la question, d'autant que je lorgne, pendant que j'écris, ce qui n'est pas facile, les 188 superbes Dodge Charger que l'Amérique a envoyé aux Forces de Sécurité Intérieure pour leur permettre de bien tenir la situation en main au Liban. Je pense qu'ils vont faire les cons avec, se courser dans Beyrouth, élaborer des cascades mais au moins ils auront de l'allure, nos FSI, et ressembleront moins à des clodos pour l'arrivée du plus petit président d'une grande nation.

Nicolas Sarkozy vient au Liban, et rudement accompagné. MG Buffet sera notamment de la partie, certainement pour amuser les enfants qui n'ont jamais vu un communiste sauf dans des livres de coloriage. Ce qui est curieux en France c'est que le PC soit reconnu d'utilité publique, mais pas le Front national. Les deux me paraissent nauséabonds, voire dangereux, mais je ne m'explique pas qu'on ait proposé le voyage aux cocos, sans faire de même pour JM Le Pen, qui aurait été bien content de retrouver ses copains des Forces libanaises comme au bon vieux temps, ou La Poissonnière qui marche allègrement sur les traces de papa avec un oeil en plus. L'excuse invoquée passe toujours par le parlement, car le FN n'a pas de groupes, mais rappelons tout de même que le PCF en a un grâce à Noël Mamère qui s'est dévoué pour la République et la voiture de fonction. Les Verts non plus ne feront pas le voyage en Orient. Sûrement parce qu'ils se suicideraient en voyant l'état des côtes ou les douilles qui tapissent le sol après les tirs de joie. Quant à Hollande, il va se faire chambrer par les Beyrouthins qui vont lui rappeler que son ex était venu il y a peu, et qu'une incroyable erreur de traduction l'avait empêchée de comprendre le sort que le hezzz (copyleft Marie) réserve aux Hébreux. Copé de son côté achètera des tapis pour sa mairie de Meaux et Nicolas apprendra à Siniora que la com, ça passe par le mariage avec une nympho transalpine et que Fouad ferait bien de répudier son actuel épouse. Au motif qu'elle n'était pas vierge après trente ans de mariage ? Si ça marche en France, ça peut passer au Liban.

Quant à moi le compte à rebours arrive à son terme. Encore quelques petits jours et je dis au revoir au pays du cèdre et du hezbollah. J'ai encore du mal à réaliser car je m'attends à ce que le parti de dieu ferme encore l'aéroport la veille de mon départ et que je sois donc coincé et incapable de rejoindre la Slovaquie. J'attends avec impatience les bouffées de nostalgie qui permettent de ne plus se rappeler que des bons moments en oubliant l'ennui, la peur et la franche haine qu'on peut éprouver devant un conducteur de taxi libanais, un sayyed de guerre qui vocifère sur la victoire divine ou un 4x4 qui balance ses ordures sur la route. Un peu de patience, quelques petits jours et je vous sortirai les violons sur le houmous, la baie de Jounieh et Fayrouz. Enfin, peut-être.

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