27 août 2007

D'un pôle à l'autre

Comment ça va les amis ? Mieux que mon cousin, j'imagine, qui vient de se faire blesser à Nahr el Bared. Heureusement sa blessure n'a été que superficielle, mais ça lui a permis de revenir voir femme et enfants, et de raconter un peu la guerre qui n'en finit pas au Nord du Liban. Visiblement, l'armée libanaise fait face à un ennemi qui ne faiblit ni en nombre, ni en équipements technologiques. Les terroristes disposeraient notamment de snipers électroniques commandés à distance, ce qui s'avère être aussi dangereux qu'efficace. La pourriture s'étale dans ce Liban, entre le hezbollah au sud et Al Qaida et fils au nord. Heureusement, aux dernières nouvelles, on part... dans un an. Visiblement, la prochaine étape sera un pays pas très lointain, mais plus calme politiquement. Pas encore l'Afrique du Sud, mais on y travaille.

En attendant, bientôt l'Islande. J'ai reçu peu de conseils de votre part, à croire que ce pays n'a guère été visités par les amateurs de Liban. Pourtant, à en croire le guide qui me permet de préparer mon safari photo, je risque de faire chauffer les cartes-mémoire. Entre les geysers, les volcans, les glaciers, les drakkars, les piscines d'eau chaude, sans parler de la faune, de la nourriture exotique (requin séché ??) et des sagas, je commence à paniquer devant le peu de temps dont je disposerai une fois sur l'île.

Je me hâte donc de finir les dernières corrections des épreuves du bouquin, ce qui dépasse maintenant le stade du pénible. Je sais maintenant pourquoi si peu de gens écrivent des livres au final : ce n'est pas la rédaction qui coûte, mais tout ce qui vient après. Et encore, il semble qu'après la parution commence le service après-vente, et surtout le mauvais moment des critiques. Pour débrancher, j'ai donc enfin vu le Caramel, de Nadine Labaki. C'est un "chick flick" bien fait, mais à déconseiller si on ne s'intéresse pas un tantinet au Liban. Le cas échéant, on passe un bon moment avec quelques spécimens de ce que le pays sait faire le mieux, les Libanaises. Je ne peux pas m'empêcher de me dire que s'il y avait plus de femmes dans toutes les instances, religieuses, politiques et économiques, le Liban irait beaucoup mieux. Une femme enverrait-elle des enfants à la guerre, comme le fait le parti du dieu vengeur ? Le chanteur Renaud avait l'air de penser que non, dans une de ses chansons, à part bien sûr Mme Thatcher. En tout cas, ça manque de femmes au pays du Cèdre macho, alors je me réjouis de m'envoler cette semaine pour une contrée où les femmes ont le droit de vote depuis la fin du XIXe siècle, et en plus sans armée ! Partir pour le futur, et bientôt revenir au passé, dans le Moyen-âge moyen-oriental des passions religieuses et des querelles pour un bout de terrain. Il a bien du courage, et il aime vraiment son pays, mon cousin. Ses enfants étaient contents de le voir rentrer un peu quand même, après des semaines d'affrontement qui risquent de se prolonger encore, tant qu'au Liban on déteste plus son voisin qu'on n'aime son cousin.

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16 août 2007

Téléportation


Je ne suis pas peu fier qu'une des photos que j'ai prises en Ouganda serve à illustrer un document des Nations Unies consacré au déséquilibre entre les sexes dans le monde. C'est le cliché que je préfère de toutes mes pérégrinations en Afrique, et je suis heureux qu'il serve à cette institution que je respecte profondément, n'en déplaise aux nationalistes de tout poil (et je ne touche bien sûr pas un kopeck pour l'exploitation de l'image). Je vous montre une autre version de la photo qui fait partie d'une série ; j'ai été très ému par cette petite fille qui transportait des galons d'eau sur la route qui mène à Jinja. Elle m'a semblé apeurée, et en même temps résignée, plus agacée de s'être fait distancer par ses camarades que consciente qu'un petit bout de son âge ne devrait pas peiner à la tâche mais plutôt apprendre à l'école et jouer.

C'est une grande chance que de pouvoir voyager comme je le fais en ce moment. Je me prépare à partir en Islande, à l'opposé de l'Afrique du Sud qui continue à me faire rêver durant mon escale à Paris. Je pense qu'en moins d'une semaine, je n'arriverai certainement pas à bout de la Terre de glace, et je me demande s'il ne faudrait pas que je prenne des stimulants pour dormir le moins possible. Mes Pentax frétillent d'excitation à l'idée de travailler si près du pôle, et j'accueillerai toute suggestion de circuit basé sur une expérience de l'île aux vikings. Si vous avez des tuyaux pour ce pays, mais aussi pour mes prochaines destinations dans le mois qui vient comme Madrid et Bonn (moins excitant...), ainsi que le Panama et le Costa-Rica, je suis preneur.

J'ai tenté d'aller voir "Caramel", annoncé comme l'événement du cinéma libanais, bien que la critique du Canard enchaîné soit très négative. Je doute que les spectateurs l'aient lu, car c'était le seul film qui affichait complet dans mon multiplexe en ce 15 août. A la place, j'ai dû me taper "Evan tout-puissant", que vous pouvez éviter. En revanche, par pitié, ne manquez pas "Persépolis", qui vous emmène du rire aux larmes en quelques secondes, et essayez le dernier Chabrol, "la fille coupée en deux". Ce film me hante plusieurs jours après l'avoir vu.

Qu'est-ce que je fous à aller au cinéma alors que je dois corriger les dernières épreuves de mon bouquin qui sort dans deux mois ?! C'est que vous ne réalisez peut-être pas à quel point c'est un procédé long et laborieux (chiant) de sortir un livre. Je suis obligé, après avoir relu et corrigé plusieurs fois le manuscrit, de me farcir les erreurs de typographie et les modifications que mon ènième lecteur a noté dans ma prose. J'avais entamé le suivant, mais me voilà collé, entre deux beaux voyages, à la relecture fastidieuse d'un texte qui me sort par les yeux, au point que j'en viens à douter de son intérêt. Chaque phrase me paraît mal foutue et sans intérêt. Je préfère de loin écrire ce blog, mes lecteurs me faisant toujours remarquer mes erreurs, mais avec tact pour la plupart. Et pour ceux qui ont eu la gentillesse d'apprécier mes photos et de me le dire, voici une dernière prise de vue de Cape Town, les piscines d'eau de mer salée qui déclinent leur bleu sous le ciel et l'océan.

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10 août 2007

Et toujours rien sur le Liban...


Le verdict est tombé : 1688 photos pour l'Afrique du Sud. J'ai l'impression que c'est bien peu pour un pays comme ça. Comme j'utilise aussi ce blog pour donner des nouvelles aux amis et garder une sorte de journal, j'ai voulu sélectionner les photos les plus marquantes du séjour, et je me suis aperçu que ce que j'ai surtout retenu, ce sont les photos incluant l'océan. Toujours le fantasme de l'océan, moi qui suis né en pleine terre, et visiblement la Mer libanaise ne suffit pas à me combler dans ma quête d'embruns. Même si elles sont toutes issues de la même thématique, au point de laisser penser que l'Atlantique est la seule attraction du Cap, je vous les montre quand même. Fidèle à Pentax depuis toujours pour ses reflex, j'utilise deux boîtiers en parallèle, le K100 et son grand frère le K10. Pour le voyage, j'avais juste pris deux objectifs, un Sigma 18-200, et la petite merveille ultra-plate, la focale fixe Pentax 40mm F2.8. J'ai toujours aussi mon Leica avec moi, mais jamais un compact n'arrivera à capturer des photos comme un reflex. Enfin, c'est pas pour demain. Donc quelques cartes postales de vacances sans prétention, mais qui, en les regardant, me permettent de mieux comprendre pourquoi ça a été le coup de foudre avec Kaapstadt. En espérant que cela devienne une liaison suivie, j'y travaille.



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06 août 2007

How is it, bru?

Mes amis, par quoi commencer ? Le Cap est une ville tellement excitante que je sens que je vais de nouveau vous raconter très platement mes aventures. Je pense que vous avez remarqué que plus l'auteur d'un blog est de mauvaise humeur, plus c'est amusant à lire, un peu comme les jeunes blogueuses qui racontent leurs galères amoureuses à un vaste auditoire et qui tout d'un coup rencontre le prince charmant, et deviennent chiantes à narrer leurs promenades dominicales chez Ikea ou leurs week-ends à Rome. Et pourtant j'ai tellement envie de vous parler de ce coup de foudre qui risque de se concrétiser à moyen-terme par une émigration en bonne et due forme vers Kaapstadt. Je vous avais laissé après un week-end à Kirstenbosch, je vous retrouve après deux jours à Stellenbosch, la région des vins. Il faut d'abord fracasser une idée reçue : les Sud-africains ne produisent pas de bibine dans de grandes cuves en inox en rajoutant des copeaux. Ils disposent dans la région du Cap de milliers d'exploitations situées dans les terres, et qui produisent un vin fabriqué avec amour le plus souvent avec des fûts venus de France. Ce ne sont pas les seuls produits de mon beau pays natal à contribuer au précieux élixir, car ce sont les huguenots, chassés de France par les catholiques et leur science du massacre de son prochain, qui ont apporté l'art oenologique en Afrique du Sud. Un monument leur est dédié spécialement dans le coin des Français, Franschhoek, où les restaurants portent des noms comme "La Provence" ou "French Connection", s'alignant sur des rues comme "Bordeaux Street". Etant un huguenot moi-même (bien que fort éloigné des principes de la religion comme vous l'avez remarqué), je me suis donc recueilli sur l'héritage de mes lointains cousins en m'empiffrant de vins indigènes et de mets locaux. Impala, crocodile, springbok, warthog, autruche, tout y est passé, et avec un petit pinotage pour faire passer le tout. D'un point de vue gustatif, voilà une des meilleures régions du monde. Voyons un peu le reste.

Pour avoir exploré Cape Town à pied, en taxi, en bateau et en hélico, je l'affirme bien fort : c'est l'une des villes les plus privilégiées que je connaisse en ce qui concerne la diversité des architectures, de la végétation ou même du climat. En une semaine, on a eu droit à un soleil de plomb en plein hiver ce qui nous a permis de nous baigner dans l'Atlantique, à une tempête avec neige à la clé sur les sommets environnants, mais aussi à de très belles journées tempérées avec juste ce qu'il faut de chaleur pour rester en t-shirt au bord de l'océan Indien. Cette diversité se retrouve également au niveau des habitants. L'Afrique du Sud recense 11 langues officielles, notamment l'anglais, l'afrikaan, le zoulou ou encore le xhosa. Il n'est d'ailleurs pas rare qu'à l'instar des Libanais, les Africains du Sud (ce pays dont les habitants n'ont pas de nom, auraient aussi pu dire ce con de Sartre) commencent une phrase dans un idiome, puis la continuent dans un autre dialecte. Les journaux posent régulièrement la question de renforcer la part des langues "africaines", l'anglais comme l'afrikaan, qui ressemble à du hollandais, étant des langues de colonisateurs.

Car l'Afrique du Sud est sur des charbons ardents. La révolution qui a détruit l'apartheid a été un modèle pour le reste du monde, se déroulant sans bain de sang, mais l'avenir paraît sombre avec les afflux de réfugiés de tous les pays environnants, en particulier du Zimbabwe. L'ancienne Rhodésie était autrefois le grenier de l'Afrique ; elle ne produit maintenant que des ventres vides qui sont attirés par la prospérité de la première économie du continent. Sur la route de l'aéroport du Cap, on aperçoit des centaines de mètres de bidonvilles, "townships" colorés qui contrastent violemment avec la modernité outrancière d'un Canal Walk, sorte de Las Vegas africain où le mauvais goût n'a d'égal, comme souvent, que l'étalage de richesse. Cape Town brasse des immigrés faméliques et des touristes replets sans qu'ils s'entrechoquent, même si, me confie un ami du cru, la ville possède certains quartiers où la violence atteint des niveaux incomparables. Partout où on peut garer une voiture, les réfugiés reconnaissables à leur veste de chantier fluorescente se battent pour surveiller le véhicule du capetonien qui est censé les remercier d'une pièce. Les salaires sont bas, les prix aussi : on peut se régaler à quatre pour l'équivalent de trente euros. Quelle aubaine pour l'Européen dont la devise bat des records, mais quel piège de penser que la vie est aussi facile que les images de cartes postales qu'il rapporte dans son gris pays.

Au moins, l'Afrique du Sud dialogue, et s'indigne en première page des quotidiens lorsqu'un chef de parti détourne 50 000 euros. 50 000 euros ? Je ricane devant mes amis sud-africains qui se désolent de la corruption de leur pays. Mais chez nous, 50 000 euros, c'est deux semaines de frais de bouche des Chirac au temps de la mairie de Paris ! Pour eux, c'est une affaire sérieuse. Ils ont souffert de l'apartheid, lorsque les populations colorées étaient chassées de la blanche Cape Town pour être relogés dans les terres. Ils ont été humiliés par le test du crayon, qui permettait de déterminer si on était crépu ou digne de vivre avec les blancs. Ils ont cru à la démocratie, alors que le régime craignait une révolution marxiste comme en Rhodésie et tentait de l'empêcher par une violence aveugle. Alors leur système, ils y tiennent, et ils sont vigilants. Tout le monde a compris que la guerre était trop dangereuse, et qu'il faut réformer les choses en se parlant car la situation pourrait devenir intenable comme chez les voisins. Alors ils se battent pour ce paradis, et j'ai envie de les aider. Kaapstadt, Ek sal het jou leif ewig. Enfin, quelque chose comme ça. Et qu'ils se démerdent tout seuls dans le Metn.

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