28 mai 2007

Pénalités

Heureusement qu'il y a le tennis, le foot et autres Sports d'Abrutissements de Masse (SAM), sinon on serait obligés de lire et de réfléchir. Et on se poserait des questions sur le monde qui nous entoure, et on n'aurait pas les réponses. Loué soit donc Roland-Garros et autres tournois sportifs à la con, il nous évite notamment de parler trop de l'élection du "président" pour lequel les Syriens ont voté en masse pour un deuxième septennat lors d’un référendum.

Les électeurs devaient répondre par « oui » ou « non »
à la question : « Approuvez-vous la candidature du docteur Bachar
el-Assad au poste de président de la République ? »Le ministre de
l’Intérieur Bassam Abdel Majid a annoncé que l’affluence était « massive
dans toutes les provinces » syriennes.Pour cette raison, il a indiqué que
les bureaux de vote ouverts à 07h00 et qui devaient fermer à 19h00 allaient
rester ouverts jusqu’à 22h00.Plusieurs bureaux de vote où se sont rendus des
journalistes de l’AFP ne comportaient pas d’isoloir et d’autres en comptaient
un, mais qui n’était pas fermé par un rideau.

Et puis, s'il n'y avait pas les matches de foot et les jeux où on gagne du pognon, on aurait sûrement des rabats-joie qui se demanderaient pourquoi Hugo Chavez, un modèle de démocratie selon la joyeuse équipe du Monde diplomatique, a fait fermer une station de télévision privée pour mieux renforcer son contrôle sur l'information dans son idyllique pays. Evidemment, les journaux français s'interrogent sur les liens entre le président Sarkozy et les médias, tout comme ils jugeaient scandaleux les rapports de domination de Berlusconi sur le PAI. Mais le Vénézuela, c'est loin, et le président est sympa : il n'aime pas les USA, donc il est du côté des opprimés, donc il ne peut pas être mauvais car être pauvre est une vertu.

Si on n'avait pas des journaux télévisés qui commencent par la météo et une analyse en profondeur des normales saisonnières, on aurait des nouvelles de l'homophobie qui monte, avec les autorités polonaises qui ont mené une étude pour déterminer si la série "Télétubbies", destinée aux touts-petits, incite à l’homosexualité. Les Russes sont plus francs : les homos qui souhaitaient organiser une Gay pride ont été tabassés. Pourquoi ? Parce que les gays, c'est mal. Tout le monde sait ça au Moyen-orient. En Egypte, on les met en prison et on les torture. Au Liban, on les nie. Qu'est-ce qui fait peur dans l'homosexualité ? Plus les pays méprisent les droits de la femme, plus ils sont effrayés par l'idée que deux personnes du même sexe puissent s'aimer. Les machos hétéros des pays misogynes ont-ils peur de succomber au même sexe ? Et d'y prendre du plaisir ?

Enfin, le sport de haut pognon fait oublier que la guerre continue et s'installe au Liban. Curieux, dans un classement récent rapporté par Le Monde, le Liban est considéré comme un pays plus belliqueux que la Syrie. Les plus pacifiques sont comme toujours les pays du Nord, et entre le premier, la Norvège, et l'Irak en dernier, il y a un monde. Oui, un monde, parce qu'on n'a pas l'impression de vivre sur la même planète. Heureusement, il y a les SAM, qui permettent à chacun d'exprimer une xénophobie de bon ton, et de clamer sa haine de l'autre en encourageant le champion body-buildé et dopé qui écrasera l'adversaire. Au final, c'est le plus important, la survie du plus fort. Le reste, c'est des conneries. Qu'importent les malheurs du monde tant qu'on a la possibilité de regarder du tennis tout l'après-midi sur France 2, avec résumé des matches sur France 3 et analyse des stratégies dans L'Equipe ? On peut même voir la guerre du Nord du Liban comme un match de foot (3-1 pour Lebanese Army contre Ajax Fatah el Islam) et la décision du tribunal international comme une relégation du Dynamo hezbollah. Avec le mercato qui pourrait ramener le fameux avant Michel Aoun dans le giron du Spartak 14 mars, pendant que le Young Boys de Damascus et le Real de Téhéran comptent renforcer leur présence dans le championnat lors des séances de tirs au buts. La vie serait tellement plus simple si elle réclamait autant de neurones que les SAM. En attendant, l'armée pilonne Nahr el Bared, et il semble qu'il y aura prolongations.

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27 mai 2007

Ce n'est pas la girouette mais le vent qui change de direction

Le Général Aoun a publié au début de ce mois un livre qu'il prétend gaulliste, et intitulé Une certaine vision du Liban, référence évidente à une certaine idée de la France développée par notre De Gaulle national. Le problème, c'est qu'Aoun n'est pas De Gaulle, et le Liban n'est pas la France. Persuadé qu'un destin national l'attend après les souffrances qu'a subies son pays, le petit général entend faire entendre sa voix et, après avoir insulté la France pour son soutien sans failles au clan Hariri, Aoun part dans la patrie de son modèle faire la promo de son opus. Le livre est coécrit par Frédéric Domont, dont j'ai déjà parlé maintes fois, car ce journaliste de RFI avait précédemment signé un ouvrage sur le hezb avec Walid Cherara, un des rédacteurs d'Al Akhbar, journal soutenant fortement l'opposition. Même s'il ne fonctionne pas directement avec l'argent de l'Iran, contrairement au parti de dieu, Al Akhbar a dès sa création affirmé que l'ennemi se trouvait à Tel Aviv, et que la campagne de propagande contre les insurgés trouvaient sa source à Washington, ce en quoi il n'a pas tort. Mais Al Akhbar entendait renouveler avec un certain journalisme libanais, et ne parvient au final qu'à être une piètre imitation du Monde diplo pour les thèses conspirationnistes, l'antiaméricanisme et l'antiosionisme primaires.

Frédéric Domont est le correspondant permanent de RFI au Liban ; comment penser qu'il sera objectif dans son travail si, pour se faire un peu d'argent de poche, il ne sert la soupe qu'aux partis de l'opposition ? On peut s'attendre à ce que M. Domont rédige bientôt les mémoires de Frangié des Maradas, un livre de cuisine druze d'Arslan ou un recueil de poèmes de Bachar el Assad. En attendant, le général dont il a été le nègre part faire sa promo mais ne cache pas son intention de rencontrer quelques hommes d'Etat français. Curieux, Kouchner vient de quitter le Liban, Aoun ne pouvait pas lui toucher deux mots de ses droits d'auteur et de son programme présidentiel ? En tout cas, son programme d'auteur est chargé, comme l'indique le communiqué de presse où s'est glissée une coquille révélatrice :

Dans la matinée du mardi 29 mai, il sera l’invité de la presse et des méfias français, étrangers et arabes dans deux conférences de presse, la première au « Presse Club » à 8h45 qui sera suivie d’une autre conférence au CAPE à 10h.

Est-ce qu'il faut lire que les médias sont des mafias, ou juste qu'il faut s'en méfier ? Aoun a compris que, seul, il ne pourrait atteindre son but d'occuper le fauteuil présidentiel. Après s'être mis à dos les principaux parrains du Liban, la France et les Etats-Unis, le grand homme comprend qu'il est temps de dénoncer ses alliés libanais, encouragé certainement par les élections françaises qui ont montré l'intérêt de la traîtrise en politique. Si Sarkozy, Besson, Kouchner ou Morin ont triomphé après avoir trahi leur camp, pourquoi Aoun ne pourrait-il pas atteindre la gloire en vendant ses encombrants alliés du hezb ? Nadim Freiha, membre de la commision politique du Rassemblement pour le Liban, critique sévèrement Chirac, et espère que Sarkozy sera un meilleur ami pour le Liban :

Le président Sarkozy est certainement l’ami d’Israël, et il n’hésite pas à le
déclarer, même devant les Libanais. Cela ne l’empêche pas pour autant d’être
l’ami du Liban. Tout au contraire, cette double amitié peu influencer
favorablement le rôle que la France peut jouer au Liban car Nicolas Sarkozy
pourrait être une force de proposition bénéficiant de la confiance des uns et
des autres.
Dans un tel cas, sa position amicale envers les Etats-Unis
pourra même aider les américains à envisager des solutions pragmatiques qui
garantissent les intérêts de ces derniers tout en instaurant la paix et la
stabilité au Liban.
La condamnation du Hezbollah qui est relative à
l’attaque du 12 juillet est argumentée et compréhensible par rapport à ce fait
précis. [...] D’ailleurs la désignation par Mr Sarkozy du Hezbollah en tant qu’agresseur, et contrairement à ce que souhaite véhiculer comme idée la coalition Hariri-Joumblatt, ne va pas à l’encontre des positions du CPL qui n’a jamais appuyé l’initiative militaire unilatérale du Hezbollah.


Le pire, c'est que ça pourrait passer et que la France, soucieuse de trouver une solution à la crise libanaise pourrait finalement pardonner à Aoun d'avoir été la girouette francophobe et pro-terroriste qu'il a été depuis des mois. Après tout, le poste de président de la République n'est que symbolique au Liban, et s'il est au pouvoir, on risque de moins entendre Aoun râler contre les incapables et les corrompus. Réponse demain après la rencontre avec Kouchner, mais le hezb déjà prépare ses communiqués pour Al Manar et Al Akhbar demandant "Qui connaît M. Aoun ?"

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25 mai 2007

La Base

Dans un pays normal, on s'occupe du problème du terrorisme de la manière suivante : on capture les terroristes, on les juge et on les met en prison. A la suite de quoi les bonnes âmes et les bolchéviques font des campagnes de presse pour protester contre la façon inhumaine dont on traite ces pauvres brebis égarées, en arguant que chacun a le droit d'être bête et insouciant quand il est jeune. Mais le Liban n'est pas un pays normal. Ici, les terroristes ont le choix. Soit ils entrent au parlement en affirmant représenter la résistance, soit ils se font tuer par l'armée à coups de mortiers. Mais il y a bien un moment où les terroristes se serrent les coudes, et le chef des terroristes canal historique libanais affirme ce soir la chose suivante :

Le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah a mis en garde vendredi le gouvernement libanais contre les conséquences d'un assaut sur le camp de réfugiés de Nahr el-Bared, dans le nord du pays, où sont retranchés des militants du groupe radical Fatah al-Islam, critiquant l'aide militaire américaine à l'armée et appelant à un règlement politique.

Il a estimé que les militants du Fatah al-Islam installés dans le camp qui ont attaqué l'armée devaient être traduits en justice mais s'est opposé à toute action militaire pour y parvenir. "Nous n'accepterons ni ne fournirons de couverture ni ne serons partenaires de cela", a-t-il dit à la télévision, affirmant que sa position ne visait pas à défendre les militants du Fatah al-Islam mais à préserver l'armée.

Hassan Nasrallah a averti que le Liban risquait d'être plongé dans la guerre menée par les Etats-Unis contre Al-Qaïda. Si tel était le cas, a-t-il estimé, davantage d'islamistes radicaux pourraient arriver au Pays du Cèdre, et entraîner le risque d'une déstabilisation du pays. (AP)

Au moins six avions ont atterri dans la journée à Beyrouth, chargés de matériel militaire américain à destination des forces de sécurité libanaises contrôlées par le gouvernement. Ce que Nasrallah semble craindre, c'est que son mouvement terroriste soit le prochain sur la liste du gouvernement qu'il conteste depuis des mois sans arriver à convaincre personne d'autre que les déjà convaincus. En retour, de façon subtile mais aujourd'hui très visible, Fouad Siniora, le premier ministre soutenu notamment par les Etats-Unis et la France, a réussi à réarmer les forces militaires officielles et à leur permette une démonstration de force afin de parer aux éventuelles tentations putschistes du hezb. Du nord au sud du Liban, on pleure les soldats tombés au combat contre les forces séditieuses, et les hommages qui leur sont rendus n'omettent jamais de préciser qu'ils venaient de tous les coins du pays.

Même si la propagande s'organise contre les velléités du gouvernement et du clan Hariri, notamment en utilisant un article de Seymour Hersh qui apparaît aussi crédible que le protocole des Sages de Sion, le Liban commence malgré tout à s'organiser au-delà des clans. La méthode pour y parvenir n'est pas nouvelle ni très glorieuse ; elle est toutefois efficace. On loue l'armée, son abnégation, le modèle qu'elle représente pour l'ensemble du pays, transcendant les confessions, les appartenances claniques et les origines socialo-géographiques. Le hezbollah s'enfonce dans son isolement, personne ne pleure les terroristes, les Libanais se sentent rassurés par les forces de l'ordre qui leur ressemblent et les protègent et les Etats-Unis reprennent pied au Liban, pendant que la France envoie son charismatique ministre des Affaires Etrangères. Celui-ci, se rappelant la mésaventure de son ex-ami Jospin à Bir Zeit, n'ose tout de même pas confirmer que le nouveau président français a bien déclaré que le hezb était terroriste. Mais on peut penser qu'il agira tout de même en gardant en tête que deux armées pour un si petit pays, c'est trop.

Tout vaut mieux que le pourrissement auquel nous sommes trop habitués, même si hélas ce sont les éternels palestiniens civils qui continuent à payer un prix trop élevé pour eux. Gaby Nasr, chroniqueur du quotidien L'Orient-le jour, a eu ce trait d'esprit aujourd'hui, et pour une fois il ne l'a pas emprunté au Canard enchaîné : "Ce qui confirme le très peu connu théorème d’Abraham : sur deux Palestiniens, il y en a toujours un qui est le dissident de l’autre.". Ou alors un qui meurt de la connerie de l'autre.

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24 mai 2007

Cancérologie

Bernard Kouchner à Beyrouth ! Je ne ferai pas de commentaires cyniques sur la présence du nouveau ministre des Affaires Etrangères au Liban, comme j'ai pu en faire pour ses deux prédécesseurs. Contrairement à Douste-Blazy, Kouchner (qui n'est pas juif, arrêtez les rumeurs) connaît son affaire, et à l'inverse de Villepin, il adopte un pragmatisme militant qui me plaît. Je pense qu'on peut compter sur lui pour ne pas aller serrer la main de Nasrallah, et qu'il saura sinon prendre des mesures adéquates, en tout cas rapporter la situation à Paris avec plus de précision que le Quai d'Orsay qui reste engoncé dans sa politique arabe et son antisionisme bon teint. Kouchner est un excellent choix en théorie comme ministre des Affaires Etrangères, et le fait qu'il réserve sa première sortie pour le Liban est un symbole bienvenu. On se doute qu'il a reçu des consignes de la part de Sarkozy, qui lui-même avait reçu, en compagnie de l'ancien président de la République française (comment s'appelait-il déjà, le grand gars sympa qui foutait rien ?), le rejeton Hariri inquiet de la future politique libanaise de la France. Mais Kouchner, s'il manque de constance en politique, PCF, puis PS, puis ministre dans un gouvernement UMP, reste sur la même trajectoire en géopolitique. Il avait critiqué l'attitude française au moment de la guerre en Irak en 2003, la jugeant "arrogante" ; je le rejoins entièrement sur ce point, on n'avait pas à traiter de haut nos alliés américains pour exorciser notre complexe d'infériorité militaire et diplomatique (même si eux-mêmes se sont comportés comme des tringles). Au moins, au Liban, la France reste un grand pays, et la visite de Kouchner est perçue comme d'importance.

Pendant ce temps, la propagande fait battre les tambours :

La direction de l’orientation de l’armée libanaise a publié hier un communiqué intitulé « Donner sa vie pour le Liban », dans lequel elle a soulevé que « l’armée a montré, une fois de plus, la solidité de sa loyauté » et l’ampleur « de son abnégation » pour « la liberté du pays et sa souveraineté ». « À l’heure où l’armée se déploie sur l’ensemble du territoire libanais, et que sa mission consiste à défendre les frontières du Sud, à surveiller les frontières terrestres et maritimes et préserver la paix et la stabilité à l’intérieur du territoire, et à la veille de la fête de la Résistance et de la Libération, symbole de la victoire de la volonté nationale sur la barbarie de l’ennemi israélien (...), la main de la traîtrise a pris pour cible de manière soudaine les positions de l’armée dans la région du Nord », a ainsi indiqué le communiqué.

C'est creux comme un discours de politicien libanais. J'aime particulièrement "victoire de la volonté nationale sur la barbarie de l’ennemi israélien". Autant le hezb est un groupe terroriste qu'il faut extraire au plus vite, une tumeur cancéreuse, (Dr. Kouchner, scalpel ?), autant ce sont les seuls à s'être battus durant la guerre de juillet 2006. Le Liban n'a pas été très uni à cette période, il l'est encore moins maintenant. Et parler de "main de la traîtrise au lieu d'évoquer directement Damas, ce n'est pas très courageux. Pas plus que de pilonner des civils d'ailleurs. Il faut évidemment rendre hommage aux soldats morts pour la patrie, mais au final, c'est leur métier. Je suis cynique ? Pas plus que l'armée qui s'apprête à commémorer la Résistance (laquelle) et la Libération (de qui ?).

Aujourd'hui a été un jour sans bombe. Tout le monde avait pourtant parié sur le prochain quartier qui serait déchiré dans la nuit. C'est pire que le supplice chinois de la goutte d'eau : on devient soulagé lorsque la bombe éclate parce qu'on n'en pouvait plus d'attendre. J'écris désormais mes posts après minuit, pour être sûr de ne pas rater la dernière attaque terroriste. Curieux comme on s'adapte à tout, les coupures d'eau, d'électricité, les routes défoncées, les attaques terroristes ou les rumeurs terrifiantes. On a notamment murmuré que les supermarchés étaient pris d'assaut ; évidemment, en faisant mes courses, j'ai dû croiser trois personnes parmi des rayonnages pleins à craquer. En revanche, j'ai pu acquérir le "dernier" Courrier International qui date du 16 mai. J'avais reçu un comment d'un de ses rédacteurs il y a quelques temps me disant qu'il me lisait. Voici la preuve que je le lis également, mais comme vous pouvez le constater, la censure libanaise est passée par là, et a caviardé le nom d'un journal licencieux. Lecteur futé, sauras-tu retrouver le nom de cette publication et pourquoi on a pudiquement biffé sa description ?

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Deux poids, deux mesures ou pourquoi je ne serai jamais croyant

Que l'on me corrige si je me trompe, mais ce soir je reste choqué. 15000 personnes seraient sur les routes, fuyant le camp palestinien du Nord pilonné par l'armée, et tout ce que l'on trouve à éprouver comme émotion au Liban, c'est la peur. Entendons-nous bien : je n'ai jamais défendu les terroristes, et c'est pour cela que je ne peux me résoudre à appeler une organisation comme le hezb autrement que par sa vraie nature. Mais quand cet été, l'armée israélienne attaquait les positions du parti de dieu, et donc tuait des civils libanais, on s'indignait à raison. Aujourd'hui, les rôles sont inversés et l'armée libanaise procède avec le même manque de précision et la même sauvagerie pour se débarrasser d'un groupe terroriste dont on sait pourtant qu'il a pris ses quartiers au Liban depuis des mois. On crachait sa haine d'Israël pendant juillet 2006 parce qu'il tentait de se débarrasser d'un groupe terroriste et ne faisait pas de quartier. Mais on soutient l'armée libanaise qui provoque les mêmes exodes auxquelles on a pu assister cet été, parce qu'on craint pour la stabilité du pays. Le Liban apprend-il les dangers de jouer avec le feu ? Même pas. Ce soir, une nouvelle bombe a explosé à Aley, dans le fief montagneux des druzes et on peut penser que de nouvelles explosions vont émailler les nuits beyrouthines. Le seul avantage c'est qu'on ne subit plus les traditionnelles feux d'artifice des beaufs qui marient leurs enfants. Mais au-delà de cet aspect positif mineur, quel avenir pour le Liban ?

A chaque bombe, on précise la "couleur" du quartier, sa confession majoritaire : Achrafieh est maronite, Verdun sunnite, Aley druze, etc. Mais il ne s'agit pas d'un conflit confessionnel : qui pourrait dire aujourd'hui qui les chrétiens suivent majoritairement entre Aoun, Geagea, Frangié, Lahoud ou Sfeir ? De toute façon, les conflits religieux sont toujours une excuse pour des conquêtes territoriales. Dieu sert de prétexte à la sauvagerie. J'ai près de moi l'excellent ouvrage rédigé par Elie Barnavi et Anthony Rowley, intitulé Tuez-les tous, de l'ordre donné aux troupes catholiques pour massacrer les protestants lors de la Saint Barthélémy, car dieu reconnaîtra les siens. La religion est un motif de désunion universel, puisqu'un croyant est persuadé d'avoir adopté la vraie religion, alors que les autres vénèrent des idoles de bois. On peut posséder plusieurs nationalités, surtout au Liban, en revanche, on ne peut être dans le même temps adepte de deux monothéismes, contrairement à un partisan shinto qui adopterait dans le même temps le bouddhisme. L'appartenance à une religion est clanique, mais n'a plus rien à voir avec la foi, qui de toute façon prouve que des centaines de millions de personnes sont dans l'erreur, puisque tout le monde ne peut pas avoir raison avec des théories différentes.

Mais les croyants ne peuvent pas raisonner, ils sont nécessairement dans l'irrationnel. Que se passe-t-il au paradis ? Chacun a sa propre version, en oubliant que le paradis des uns, c'est l'enfer des autres. On est dans la plus parfaire irrationalité, et un croyant ne voit pas les failles de logique dans le raisonnement des théoriciens de sa foi, car ils prendront soin de trouver un sophisme qui rééquilibrera des axiomes déjà branlants. De la même façon, le Liban restera dans l'irrationalité concernant les évènements qui se déroulent en ce moment : les Israéliens étaient des barbares, et leurs victimes civiles des martyres, alors que les mêmes victimes civiles de l'armée libanaise sont des morts qu'on ne pouvait éviter, ils n'auraient pas dû se trouver là. Ce phénomène est connu ; si à la télévision, on déclare que 100 morts ont été causés par un attentat à Bagdad, le téléspectateur français ne s'en émeut plus. Si par malheur, l'une de ces 100 victimes était française, le deuil sera national, et l'émotion à son comble. Les morts n'ont pas tous la même valeur, et les Palestiniens sont les moins chers du marché moyen-oriental.

J'essaie de ramener un peu de raison par le biais de ce blog et de ses commentaires, mais je me doute qu'il est plus aisé de parler calmement et de tenter de voir les aspects de la situation quand on n'a pas vécu la guerre de 1975-90. Je ne jette pas la pierre aux Libanais qui voient déjà le pays revenir à ses pires démons. Je les comprends, mais je me dois d'essayer de ne pas céder à une vision clanique et manichéenne d'un Liban qui pourtant se complexifie au fur et à mesure. Les Américains ont proposé leur aide au gouvernement Siniora, une démarche impensable il y a quelques mois. Le pays change, les alliances se transforment, mais les enjeux restent les mêmes : un Liban moderne, libre et démocratique, et il existe plusieurs façons d'y parvenir car le 14 mars n'est pas la panacée, ou un Iran bis avec la complicité d'un vieux général qui se rêve en Charles de Gaulle ? Sous Franco, on clamait "Viva la muerte", et le fascisme a depuis été condamné par l'histoire. Aujourd'hui, on hurle "Allah Akbar", et on tend les bras à la grande faucheuse. Quelle différence ? Aucune, on reste sous l'emprise de la folie religieuse qui pousse les petits et les sans-grade à se sacrifier pour les ambitions de gloire des chefs de guerre/leaders spirituels. Si vraiment les terroristes veulent atteindre le paradis par la mort, tuez-les tous, dieu reconnaîtra les siens. Mais essayez d'épargner ceux qui n'ont rien demandé, et qui, même s'ils n'ont pas la même couleur de peau ou la même religion que leurs assassins, n'en sont pas moins des hommes. Cela vaut, il me semble, pour tous les pays.

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22 mai 2007

Pythie

Le général Aoun a tenu une conférence de presse au cours de laquelle il a renouvelé une fois de plus ses violentes attaques contre le gouvernement de Fouad Siniora, affirmant que les derniers événements au Liban-Nord ont mis en évidence « une négligence et une incompétence flagrantes au niveau politique, parallèlement peut-être à des lacunes au plan technique ». « Il semble qu’il n’y ait aucune coopération et aucune coordination entre les services de sécurité, ce qui reflète une compétition déplorable entre l’armée et les forces de sécurité », a affirmé le leader du Courant patriotique libre.

Je ne supporte pas ceux qui dansent sur les volcans en éruption. Aoun en fait partie, et ce pour des raisons évidentes. Au lieu de soutenir la nation dans ces jours difficiles, il continue son travail de sape, soutenu par des hordes abandonnant tout jugement critique qui sont persuadées que le général les sauvera. Les sauvera de quoi ? Des terroristes du hezbollah qui ne s'incorporeront jamais dans la démocratie libanaise ? Quand on étudie l'histoire en Irlande du Nord de l'IRA, pourtant mouvement laïc bien que principalement catholique, on s'aperçoit qu'à chaque tentative de paix, les hardliners ont refusé de déposer les armes et sont partis se constituer en groupuscules encore plus violents. De la même façon, les partis palestiniens sont divisés aujourd'hui entre partisans de la violence à outrance contre Israël, et ceux qui préfèrent le pragmatisme. Mais chez les Palestiniens, il y a aussi des victimes, qui sont trop jeunes pour avoir choisi leurs camps, ou qui n'aspirent à rien d'autre que de vivre normalement.

Ceux-là, l'armée en a tué plusieurs entre hier et aujourd'hui, en pilonnant Nahr al Bared, le camp palestinien du nord du Liban où se sont réfugiés les terroristes pro-syriens de Fatah el Islam. Au Liban, on frémit pour la suite et on célèbre les soldats morts qui ont défendu le pays contre la subversion. Mais on oublie les Palestiniens coincés entre deux feux, comme toujours depuis des décennies. On peut approuver intégralement l'existence d'Israël comme je le fais, sans pour autant considérer que les Palestiniens doivent payer en permanence pour les fautes des autres, en l'occurrence les frères arabes. Au Liban, les Palestiniens vivent dans des ghettos, et on les craint car on se souvient qu'ils ont tenté, par leurs groupes armés, de prendre possession du pays. En Jordanie, ils constituent plus de 60% de la population, et Septembre noir reste un souvenir atroce. A Gaza, ils continuent la guerre contre Israël, conflit perdu d'avance malgré les mensonges du hezb qui prétend être en mesure de vaincre l'ennemi sioniste. Le Liban a peur ce soir, à l'heure où j'écris, on ne sait pas encore si une troisième bombe de suite va détonner dans la nuit pour rappeler que ceux qui ne croient pas à la vie ont les moyens de l'interrompre à tout moment. Mais je pense aussi aux Palestiniens, dans leurs camps, qui ont payé le prix du sang sans avoir reçu quoi que ce soit en échange. Aucune image ne filtre des morts civils, et pour cause : les camps sont autogérés, des Etats dans l'Etat. J'imagine quand même la douleur de ceux qui n'y sont pour rien, et qui aimeraient juste un peu d'espoir pour la suite.

Etre un homme d'Etat, c'est aussi penser à la souffrance des hommes et l'empêcher par tous les moyens, pas être obsédé par sa réélection, ce qui semble être le cas d'Olmert, comme de Bush ou d'Aoun. Quant aux médias, ils doivent informer des réalités du monde. Et pourtant, quand je vois les unes des journaux français, j'apprends que Washington et Pékin sont en désaccord sur l'économie, que le bac approche, que la femme du Premier ministre français est galloise et qu'il fait chaud en France, étonnant pour un mois de mai. Je ne veux pas donner de leçons, juste rappeler la chose suivante : à force de vouloir éviter des catastrophes en détournant le regard, on se retrouve nez-à-nez avec pire. Je souhaite que la France ne se désintéresse pas du Liban, car ce petit pays va avoir besoin d'aide très bientôt. Enfin, le temps qu'il fasse un choix de civilisation et arrête de confondre terrorisme et résistance.

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21 mai 2007

Surboum

Encore un attentat à Verdun cette fois, à "Beyrouth ouest", près d'un centre commercial, le Dunes. Les terroristes ne chôment pas, c'est d'ailleurs leur principale qualité. Je me demande si vraiment leur objectif est d'empêcher l'instauration du tribunal international : quand on voit les images, comme je les regarde en ce moment sur LBC, on se rend compte que le Liban ne peut pas se sortir tout seul d'une crise dans laquelle de nombreux pays étrangers ont contribué à le plonger. Alors que les affrontements entre Fatah el Islam et les forces de sécurité libanaises (et non pas les forces libanaises comme on l'écrit dans certains journaux, il s'agit d'un parti politique) continuent, et que les militaires ne sont pas à la fête, un deuxième front semble s'ouvrir, plus insidieux, mais qui conserve la marque de l'avertissement. En frappant de nuit, les terroristes veulent montrer qu'ils peuvent frapper quand ils veulent, mais s'arrangent pour qu'il y ait le moins de victimes possibles, tout en provoquant le plus de terreur grâce à la nuit. Vous vous imaginez expliquer la situation à vos enfants, réveillés dans leur sommeil par les cris des adultes ? Tout vaut mieux que cette situation pourrie, à laquelle chacun a contribué. Il doit se sentir bien con, le général Aoun, en contemplant ce dont sont capables ses nouveaux copains. Et Nasrallah aura du mal à expliquer la nécessité de ces attentats qui n'ont pas fait une seule victime israélienne...

Est-ce que l'espoir existe encore ? Est-ce qu'on peut se dire qu'en serrant les dents, en attendant que ça se passe, on aboutira à une situation meilleure ? Depuis 1996 que je suis installé au Liban, la situation a empiré, après une brève embellie qui n'a eu d'autre mérite que de faire grimper le prix de l'immobilier. Aujourd'hui, le Liban est divisée entre camps irréconciliables, comme au temps de la guerre de 1975-90, alors même qu'on avait pensé qu'elle servirait de leçon. Mais non. Les hommes comme Aoun n'apprennent pas, ils se trompent et expliquent que c'était intentionnel. Les hommes comme Nasrallah ne prennent de leçons que de leur dieu, dont ils sont le ventriloque. Et ceux qui commettent les attentats en pleine nuit, qui réveillent les enfants et blessent les vieillards, ne méritent pas d'être considérés comme des humains. Ni des animaux non plus, je n'ai jamais assisté à un attentat entre deux factions de blaireaux ou de caniches. Le Liban me rend fasciste, me fait perdre ma foi en l'homme, me fait comprendre la violence. Dois-je partir ? Combien d'entre nous se posent la question ici ? Seulement ceux qui ont le choix, ce luxe ultime au Liban de pouvoir partir si le navire coule.

Des hommes courent partout, tentant de contenir la nouvelle catastrophe qui a frappé le Liban. Il n'en faudra pas beaucoup plus pour faire revenir les vieux démons, invoqués dans les nuages de fumée et les explosions sulfuriques. Et c'est toujours la même histoire, la même litanie.
N'oubliez pas le Liban. Encore et toujours.

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20 mai 2007

Chat échaudé craint l'eau froide

Je voulais vous parler de la Jordanie, vous dire à quel point c'est revigorant de voir un pays arabe en paix avec Israël, vous parler des rencontres que j'y ai faite, un Irakien qui se réjouit de la nomination de son ancien patron au poste de ministre des affaires étrangères en France, d'un Japonais qui a peur que le nouveau président français préfère la Chine au Japon, d'un Israélien qui sursaute en entendant un pétard dans les rues d'Amman et qui rêve d'aller dans la Békaa, d'un Américain qui trouve que Tel Aviv et Beyrouth se ressemblent tout de même beaucoup.

Mais les évènements en ont décidé autrement. Avec un timing parfait, suivant l'excitation de l'élection présidentielle en France, le Liban rappelle qu'il n'est pas un pays comme les autres. D'abord entre hier et aujourd'hui, des affrontements d'une brutalité rare ont opposé un groupe palestinien, Fatah al Islam, considéré comme soit proche d'Al Qaida, soit plus vraisemblablement du gouvernement syrien, et les forces de sécurité libanaises. Je reproduis l'article de Le Monde :

Tout a commencé samedi par une bataille rangée à Tripoli. La police y a investi un appartement occupé par des militants du groupe : elle y recherchait les suspects du braquage, la veille, d'une banque, au cours duquel les voleurs sont repartis avec 125 000 dollars (92 750 euros). Les militants ont riposté, et la bagarre, qui a gagné les rues avoisinantes, a duré tout l'après-midi.

Les militants se sont ensuite emparés de positions de l'armée libanaise à l'entrée du camp de Nahr Al-Bared. Dimanche, les combats faisaient toujours rage dans le camp d'où s'élevait une épaisse fumée. L'armée libanaise, qui y a dépêché des renforts, pilonnait sans relâche les positions des combattants palestiniens à coups d'artillerie et à l'arme lourde. Tripoli demeurait, quant à elle, en état de siège.

Les images de l'assaut ont montré que le gouvernement tient à ce que la situation ne dérape pas avant l'instauration du tribunal international. On pouvait notamment voir un membre des forces de sécurité tirer au RPG sur un immeuble, visant l'appartement où s'étaient retranchés les terroristes. Ceux-ci affirment maintenant que l'attaque dont ils ont fait l'objet était injustifiée, mais que si l'armée les provoque à nouveau, "le feu des volcans" s'abattra sur le Liban. Tristes cons. On aurait pu penser que le message du gouvernement libanais serait suffisamment fort pour dissuader les partisans du chaos de se tenir tranquille, mais la journée ne s'est pas achevée sur une victoire de la cavalerie.


Je regarde en ce moment les images d'un incendie qui continue près de l'ABC d'Achrafieh, un centre commercial en plein coeur du quartier chrétien de Beyrouth. Une bombe d'environ 15 kg a explosé à proximité, pour le moment peu de victimes, une femme a succombé et on recense dix blessés. Mais c'est surtout la preuve que la situation a pourri depuis qu'on l'avait laissé sans plan. Les mêmes problèmes subsistent, la présence des terroristes du Hezbollah et leur réarmement au Nord du Litani, la question des camps de non-droit palestiniens, la folie mégalomaniaque de Aoun, le passé sulfureux des membres du 14 mars, la volonté iranienne d'utiliser le Liban comme théâtre d'opérations, la formidable capacité de manipulation syrienne, l'indécision des occidentaux qui continuent à penser que Munich en 1938 était une sage décision. En plus, les Russes qui commencent à s'immiscer dans la diplomatie libanaise, un nouveau président en France dont on ne connaît pas encore les capacités de fermeté, un leader américain qui aimerait partir en beauté, un premier ministre israélien soucieux de se refaire une réputation pour ne pas laisser son fauteuil à une ex du Mossad, et tout ça fait que je vous parlerai de la Jordanie une autre fois. Cruelle retour à la réalité après un duel pour de faux entre Royal et Sarkozy. Le Liban rappelle chaque jour qu'il y a de vrais terroristes, de vrais traîtres, et de vraies guerres et que la France est décidément bien civilisée.

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14 mai 2007

5 ans


Je me rends compte que j’ai laissé passer la date d’anniversaire de ce blog. En fait, je l’ai oublié, mais je sais grâce à Madame que c’était il n’y a pas longtemps, en mars je crois. En effet, il y a cinq ans, je suis tombé sur un article dans Libé, le journal de bobos-anti-Sarko, qui racontait comment on pouvait créer un journal en ligne sans avoir à s’emmerder avec du code html. J’en ai donc parlé à cette donzelle, avec l’idée, comme elle écrit bien, de faire un blog commun. Finalement, on a fait blog à part, et c’est tant mieux vu les sujets qu’on aborde respectivement (quoique sur la choucroute, on se retrouve parfois). Au départ, Window in Lebanon devait être en anglais, ce qui explique son titre, mais comme c’est devenu ma langue de travail principale, j’ai préféré continuer en français pour avoir au moins une activité dans mon idiome natal. Enfin, ça fait donc plus de 5 ans que ce blog existe, ce qui nous rajeunit pas, mais me permet de remercier les lecteurs qui m’ont fait l’honneur de me lire, et les commentateurs qui, depuis bientôt un an, enrichissent mes posts. Et c’est reparti pour 5 ans.

Même si les thèmes ont changé durant cette période, et que mes posts n’ont cessé de croître en longueur, certaines colères sont récurrentes. Aussi, quand je lis dans Le Monde, "Le pape dénonce les courants latino-américains qui confondent foi et "idéologie politique", j’ai toujours du mal à garder mon sang-froid. Le pape, chef du Vatican, organisation politique s’il en est, qui fait la leçon à ses concurrents sur le terrain religieux !? Et que penser de la vacuité de la déclaration suivante :

"L'option préférentielle pour les pauvres est implicite dans la foi chrétienne", a-t-il souligné, mais pas question de s'en tenir à une lecture politique, économique et sociale de la réalité : "C'est la grande erreur des tendances dominantes dans le siècle dernier, une erreur destructrice comme le démontrent les résultats des systèmes aussi bien marxiste que capitaliste", a-t-il expliqué, stigmatisant "l'échec des systèmes qui mettent Dieu entre parenthèses".

Le Vatican a décidé de mettre ses propriétés en vente et de distribuer sa fortune aux pauvres, tournant le dos à son passé de marchand du temple ? Et que dire de cette nouvelle doctrine qui renvoie dos à dos marxisme et capitalisme ? Encore une victime du syndrome Bayrou ? Je ne connais pas la popularité réelle du pape, ou de sa religion. Je suis juste dégoûté lorsque je le vois prêcher dans une direction et agir dans une autre sans que cela dérange ses suiveurs.

Heureusement, la bonne nouvelle vient de Turquie, où les défenseurs de la laïcité ont défilé par centaines de milliers à Izmir. Je ne sais pas ce que vaut la laïcité à la turque, et on pourra certainement juger que le pays n’est pas encore au point en ce qui concerne les droits de l’homme. Mais que des manifestants expriment leur attachement au respect des religions et par extension des non-croyants redonne un peu d’espoir dans un siècle où chacun se balance des blasphèmes à la figure. Au Liban, certains groupes ultra-religieux protestent en ce moment contre un numéro du torche-cul Voici montrant un tatouage de Nicole R i c h i e arborant un symbole religieux. Même s’ils ne sont que minoritaires, ces imbéciles rappellent que les interdits des religions ne doivent concerner que ses pratiquants, et que l’extrémisme religieux est aussi destructeur de libertés que les totalitarismes du XXe siècle.

Ces affrontements deviennent douloureux, et même en France, où heureusement la religion n’a pas (trop) été un facteur de vote, on sent que le résultat a laissé des séquelles, et que les opposants seront difficiles à réconcilier. En prétendant rassembler des personnalités de gauche comme de droite, Nicolas Sarkozy montre qu’il a du Bonaparte en lui pour ce qui est de la stratégie. Rares en effet sont les personnalités de l'autre camp qui, contactées, mépriseront un maroquin ou une petite mission, ce qui anéantira encore plus les chances de reconstruction de la gauche, débordés en enthousiasme par son extrême, et profondément divisée par la nouvelle garde Royale. Ce monde est passionnant. Oui, c’est reparti pour encore au moins 5 ans. Avec vous. Merde, on dirait un slogan UMP !?

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11 mai 2007

Anno Domini

Au Liban, un coup de vent est littéralement suffisant pour mettre le pays par terre. Depuis hier, Zéphyr s'agite, souffle à n'en plus finir, ce qui a pour effet d'arrêter l'électricité (?!), conduit à bloquer les générateurs, et donc pendant de longues périodes sans courant électrique plus d'Internet, plus de télé, plus de lumière, plus rien. La prochaine fois qu'Israël veut attaquer le pays, mon conseil, pas besoin de balancer des tonnes de bombes, il suffit de retourner les avions, et de pointer les réacteurs vers le Liban. Le souffle d'air sera suffisant pour tout bloquer, c'est pas cher et c'est très écologique. Qu'ils attendent aussi qu'ils pleuvent parce que là en plus les routes deviennent presque impratiquables, donc plus n'est besoin de couper les infrastructures routières à coups de roquettes. Tous ces conseils et bien d'autres dans mon prochain livre cosigné avec Nicolas Hulot "Vers une guerre écologique - les morts seront en bonne santé (merci Jean Leloup)".

Reconnaissez sinon que cette élection fait le bonheur de tous : la droite a triomphé, et la gauche revient dans son rôle rassurant de critique à l'égard du pouvoir dont elle s'est toujours méfié. Etre dans l'opposition, c'est quand même confortable et ça permet d'être du bon côté, celui qui ne fait pas d'erreurs puisqu'il ne fait rien. A voir l'hystérie de Libé.fr et des commentaires laissés par les "libénautes" après chaque article consacré aux vacances de Nicolas Sarkozy, on se dit que le plus grand drame du petit peuple de gauche aurait été de récupérer la présidence 12 ans après Tonton. Je pense que Ségolène Royal était la seule qui y croyait vraiment, son fils Thomas aussi peut-être, celui qui n'a pas encore mué. Les autres au PS, surtout devant l'avalanche de reportages montrant les dessous de la campagne, semblent avoir abandonné dès qu'il a été clair que ce serait une gonzesse qui porterait l'étendard. Le syndrome Jeanne d'Arc chez les socialistes, pas leur truc, c'est plutôt la figure du patriarche qui fonctionne. Rocard devrait se laisser pousser la barbe, sur un malentendu, ça peut marcher.

Bayrou continue à s'installer dans cette critique de tout si confortable en politique, comme dans la vraie vie. Quiconque a dû un jour assumer des responsabilités sait que jouer au chef n'amène que des ennuis. En revanche, faire le martyr n'apporte que des bienfaits. Plus les députés UDF, derviches tourneurs de formation, s'éloignent de lui, plus Bayrou rayonne : avec un peu de chance, il ne sera même pas élu en juin et sera complètement banni de la vie politique nationale. L'occasion pour lui de parcourir les médias pour dire qu'on ne l'y trouve jamais, et de continuer son néo-poujadisme électoral : après l'abolition de l'ENA et le "tous pourris", quel slogan de Pierre Poujade va-t-il reprendre ? Je ne vois que la défense des petits commerces et de l'artisanat qui n'a pas été intégré par Sarkozy. Et j'imagine bien Lou Bayrou un crayon sur l'oreille pour montrer qu'il comprend cette France des petites gens qui ont bien du mal contre les vilains supermarchés.

Ou alors, il pourrait coacher les jeunes. Quand on voit ce qui s'est passé à Tolbiac, on se dit que nos étudiants, malades d'avoir loupé Mai 68 et exultant d'avoir un président qui crache sur cette époque hédoniste, ces jeunes pleins de foutre et d'hormones disais-je, auraient bien besoin d'un leader charismatique, ou en tout cas d'un politicien expérimenté. Mes petits, on ne fait pas la grève et on n'occupe pas son établissement en raison de mesures que le pouvoir POURRAIT prendre. On attend qu'il les envisage et là, on saccage son outil de travail avec des pavés payés par les impôts de papa et maman. On pouvait croire que les étudiants seraient alarmés par les classements internationaux qui montrent la faiblesse de l'université française dans le monde. On aurait imaginé qu'ils auraient compris que le moment est venu de changer, et de ne plus se reposer sur l'image d'une Sorbonne sur T-shirt pour touristes japonais. Au lieu de ça, ils vont défendre une université qui s'écroule, minée par les mandarins, le manque de moyens par rapport aux grandes écoles et l'inadéquation totale avec le monde du travail, sans parler de l'inanité de l'agreg ou de la CNU. Au final, je trouve que Nicolas Sarkozy est le meilleur cadeau qu'on ait pu faire à ces jeunes désoeuvrés qui ont parfois tant de mal à trouver un symbole réac du monde adulte entre deux parties de PSP et une discussion sur l'avenir du bolchévisme (Attention ! Etudiant qui me lit, je ne parle pas forcément de toi, mais de tous les petits branleurs qui tentent d'intégrer la direction des partis de gauche et d'extrême gauche en foutant le bordel à la fac, donc pas de comment acnéique pour défendre ton UFR de province où les jours coulent heureux à l'ombre des platanes) : on verra bientôt fleurir les portraits de not' président avec une moustache à la Hitler, et les slogans des années Cohn-Bendit vont refleurir à l'approche des examens. Et tout le monde sera content, je vous dis.

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09 mai 2007

Pas mal au Paloma

Alors c'est tout ce qu'ils ont trouvé contre Sarkozy ? Une croisière qui ne coûte rien à la nation et qui montre juste que le futur président, comme tous les hommes politiques français, côtoient des industriels et des patrons de média ? Lorsque M. Gayssot faisait la retape auprès de riches mécènes pour sauver son quotidien L'Huma, on n'avait pas des couvertures de Libé comme aujourd'hui, où l'on voit le yacht incriminé avec comme titre "Boat People". En France, un président devrait prendre ses vacances au camping, comme tout le monde. Imaginez les titres de la presse "de gauche" si c'était le cas : Sarko démago à Palavas-les-flots. Ce n'était certes pas une brillante idée de prendre ses vacances de manière aussi ostentatoire. Cela dit, lorsque la famille Bolloré a accueilli Léon Blum après la Seconde guerre mondiale, y-a-t'il eu pareil tintamarre de la presse people ? Franchement, je plains les anti-Sarko viscéraux. Il va falloir faire mieux dans les mois à venir. A moins que "Nico Maltese" ne fournisse la matière comme il a su si souvent le faire. La résistance s'organise, et permet au moins le retour de Frantico-Trondheim dans un nouveau blog dessiné qui, pour le moment, manque d'inspiration.

Bayrou de son côté doit déjà faire face à des défections massives dans ses rangs. On se doutait que ses gesticulations révolutionnaires étaient du flan, on en est maintenant convaincu. L'UMP punit sévèrement le petit Béarnais qui n'aura sûrement pas de groupe parlementaire à l'Assemblée. Ceux qui ont eu la bonne idée de voter pour lui pendant les élections doivent raser les murs : on connaissait le vote utile, voilà son inverse. Le néo-poujadiste retourne à ses tracteurs, et je m'en réjouis : on pourra peut-être recommencer à parler de politique en France, une fois que le PS aura retrouvé ses esprits, et que l'UMP aura récupéré son chef de guerre.

Les législatives approchent à grands pas et on aura donc l'occasion de s'engueuler dans les comments en se traitant de noms d'oiseaux sous prétexte qu'on n'est pas d'accord. Continuez : grâce à vos critiques, je réfléchis mieux. En attendant, je voulais vous faire part d'une rencontre qui a enchanté ma vie beyrouthine, le temps de quelques minutes. La semaine dernière, j'ai rencontré Patrick Chesnais (!!). Le comédien tourne en ce moment au Liban un long-métrage sous la direction du réalisateur Hany Tamba, qui a reçu un césar du court-métrage pour After Shave. J'ai vraiment cru à une blague au début (qu'est-ce qu'il fout là ??), car M. Chesnais fait partie de ces acteurs élégants, discrets, charismatiques, qui ne sont pas sur tous les plateaux de télé à montrer leur cul sous prétexte de vendre leur camelote. Je suis donc doublement enchanté : de l'avoir vu quelques minutes (mon côté midinette) et surtout de savoir que le cinéma libanais s'active et utilise de bons acteurs pour refaire parler de lui. Si vous êtes à Beyrouth, écrivez-moi, je vous communiquerai le nom de l'hôtel de M. Chesnais, et vous pourrez jouer les paparazzi. Il faut reconnaître que venir à Beyrouth en ce moment, ça demande un certain courage pour un acteur. Mais quand on a joué dans Je ne suis pas là pour être aimé, on n'est pas n'importe quel comédien. Ahlan Was Ahlan, Monsieur Chesnais.

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06 mai 2007

Vae Victis

Plus de 70% pour Nicolas Sarkozy à l'Ambassade de France à Beyrouth ! Les double-passeports libano-français confirment que rien ne leur fait plus peur que d'être pris pour des Arabes. le futur président s'est fendu d'un magnifique discours hier soir où rien ni personne n'a été oublié, pendant que sa rivale, défaite, arborait une mine de vainqueur. Il est vrai que le parcours de Ségolène Royal mérite d'être salué, bien que sa campagne ait hélas enterré le féminisme politique. La prochaine fois que les machos entendront que l'on demande plus de femmes en politique, ils pourront tranquillement répondre que quand elles se présentent, on ne vote pas pour elles ! Et ils n'auront hélas pas si tort que cela.

Un peu de déception donc, à la suite de cette élection, même si ce n'est pas la guerre civile qui couve en France. Chez le nouvel expert de la politique française, Fogiel, les SMS se partageaient hier soir entre ceux qui voulaient quitter la France et avaient honte d'être français, et ceux qui pensaient au contraire qu'une nouvelle ère s'ouvrait pour notre pays. Si Nicolas Sarkozy n'accomplit que la moitié de ses promesses, ce sera le plus grand président de la Vème République. Je n'y crois pas trop, mais déjà réconcilier la France avec son plus vieil allié, les Etats-Unis, et arrêter d'humilier Israël sous prétexte d'une politique arabe commerciale, ce sera un beau début. A l'intérieur, on aura bientôt le troisième tour social qui rappellera qu'en France, un président gouverne avec les forces de la réaction autant qu'avec les puissances médiatiques ou industrielles. Un point positif : Sarkozy pourra enfin mettre en pratique sa fameuse méthode et on sera tous gagnants. Soit il réussit, et tant mieux, soit il échoue et il la ramènera moins.

Ce fut une belle campagne tout de même. Le Front National est écrasé, le bolchévisme agonise, et Besancenot, le chef des bobos, n'a pas dépassé les 5%. Et puis, bientôt les législatives qui nous promettent une chute brutale pour la "révolution" de François Bayrou. La France a toujours cette capacité d'éviter les catastrophes juste avant qu'elles ne surviennent. Espérons qu'elle continuera à posséder ce talent d'équilibriste surtout devant les nombreuses tâches qui attendent notre nouveau monarque. Je me fais quand même du souci pour Mme Royal, qui risque de payer cher un échec annoncé, alors que son score tient du miracle. Et si on donnait une majorité PS à l'Assemblée nationale en juin ? Voir Ségo et Sarko assister ensemble aux réunions internationales comme lors des cohabitations précédentes auraient un petit goût d'idéal centriste : prendre les meilleurs, les forcer à vivre ensemble et attendre le résultat. Un bel oxymore, ou une union sacrée. Mais peut-on vraiment penser que les éléphants vont prendre en compte le score Royal pour lui donner le commandement de la bataille législative ? Curieusement, je pense que le PS sera le premier à conclure que les femmes en politique, ce n'est pas si important que ça. Et on saura finalement qui garde les enfants.

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02 mai 2007

Quelques remarques avant d'aller voter (2)

  • C'est la première fois que, à l'anglo-saxonne, on appelle les deux candidats du second tour par leurs surnoms. Il ne me semble pas qu'on ait dit "Yoyo" pour Jospin ou "Jacquot" pour Chirac. Comme on dit Tony Blair au lieu d'Anthony, ou qu'on disait Bill pour William Clinton, cela implique une certaine connivence avec le peuple. Forcée, mais qui marche. Ségo contre Sarko, a fait très Star Ac, comme dire que ce sont les finalistes d'ailleurs.
  • Les patrons de presse aiment peut-être Nicolas Sarkozy, mais les journalistes roulent pour la plupart en Ségo.
  • Si on se base uniquement sur les comités de soutien, il vaut mieux voter blanc. Voter Disiz la peste (l'auteur éternel de "ch'pète les plombs" où il parodie Falling Down et tue tout ce qui le gêne) ou voter Roger Hanin, ça fait regretter les compagnons de route du PCF. Non, quand même pas.
  • Argumenter que Ségolène Royal n'est pas bonne en communication est un truisme. C'est ce qui la rend sympathique dans sa "gaucherie". Il vaut mieux avoir un candidat qui a du mal à mentir et qui irrite lorsque c'est le cas, qu'un candidat trop rompu à cet exercice.
  • Prétendre que Nicolas Sarkozy menace les libertés individuelles est un slogan de bolchévique. Quand donc arrêtera-t-on de prendre la droite pour une entité liberticide ?
  • Les slogans de Mme Royal sont imprimés en violet. Malin comme couleur, c'est rouge plus bleu. Gauche plus droite. Peut-être que ça marche d'un point de vue subliminal pour les électeurs de Bayrou qui veulent le beurre et l'argent du beurre en même temps.
  • Vous allez vraiment regarder le débat de ce soir pour vous aider à vous décider ??

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