27 février 2007

Sentinelles

Les premiers humvees équipent maintenant l'armée libanaise. C'est rassurant de voir ces gros engins, favorisés dans leur version civile par les beaufs fortunés, monter la garde en compagnie du matériel plus vétuste dont se sert une force de l'ordre qui n'a jamais pu montrer sa valeur. On risque heureusement de ne pas avoir à admirer ses prouesses cette année car L'orient-le jour affirme que le Mossad israélien considère qu'il n'y aura pas de conflit au Moyen-orient en 2007. Que penser de cette information ? Déjà, se demander comment un journal libanais a pu se procurer le compte-rendu d'un service secret israélien. Si notre quotidien francophone national a accès aux rapports de l'Institut, on peut largement douter de leur valeur, à commencer par leur niveau de secret, ou de leur crédibilité.

On évitera donc certainement un gros conflit dans la région, mais le terrorisme continue de faire des victimes, que ce soit en Irak, en Afghanistan, ou même en Arabie saoudite, où quatre Français ont été tués. Curieux quand même : si un Saoudien avait été assassiné en France, on aurait immédiatement parlé de crime raciste ; si un Israélien était victime d'un meurtre en France, on évoquerait la piste antisémite. Mais des Français qui se font tuer en Arabie saoudite, c'est différent, ce n'est pas du racisme, c'est du terrorisme on vous dit. Quelqu'un m'explique ?

Les classifications de ce genre m'exaspèrent, tout comme l'attitude que l'on adopte vis-à-vis du Liban. Par rapport à mon post précédent, certains ont cru bon de mettre en avant leur pays pour affirmer qu'il est mieux que le Liban. J'ignorais qu'il existait un concours du meilleur pays, auquel cas, je pense que la France gagne largement face à Israël. Ce raisonnement est idiot. Parler du Liban, le critiquer comme je le fais, ce n'est pas pour pointer ses défauts avec horreur ; c'est plutôt pour faire comprendre ce pays, et essayer à une très modeste échelle de contribuer au débat sur son avenir. Je ne connais pas de pays qui soit sans défaut, il en va de même pour les gens. Mais le Liban a cela de fascinant que ses habitants ont décidé de survivre ensemble malgré tout. On peut les comparer à des cloportes qui s'accrochent à leur bout de poussière si certains se sentent confortés dans leur propre fierté nationale. Je préfère voir les Libanais comme l'avant-poste d'un espoir au Moyen-orient, qui pourrait préfigurer une meilleure diffusion de la démocratie dans le Machrek comme dans le Maghreb. Et si vous me lisez, c'est que vous êtes un peu d'accord.

|

24 février 2007

L'orient la nuit

Le Liban possède de nombreux titres de presse francophones, même si le niveau de français laisse souvent à désirer... L'Orient-le jour s'en distingue par son degré soutenu de langue et offre chaque jour à son lectorat, principalement chrétien "conservateur", ses 15000 copies contenant des articles tirés de l'AFP, des compte-rendus d'actualité locale et des analyses du monde en prenant le Liban comme épicentre. Moins lu par les Français que l'autre quotidien en langue étrangère, le Daily Star, l'Orient-le jour s'est voué corps et âme à défendre le camp du 14 mars, faisant ainsi le choix d'un Liban démocratique, mais pour ne pas apparaître comme un organe de presse traître à la patrie, le journal a tendance à en rajouter dans le nationalisme libanais. Ainsi, cet article de Issa Goraieb, indéboulonnable chef de la rédaction, intitulé "Des souris et des fauves" en date d'aujourd'hui :

Pays d’appartenance (et non plus seulement de visage) arabe, patrie définitive, a-t-il été nécessaire de préciser dans le préambule de la Constitution de Taëf, le Liban a miraculeusement tenu tête aux visées tantôt conflictuelles, tantôt objectivement convergentes, de ses proches voisins. C’est-à-dire de la Syrie, qui n’a jamais renoncé à ses prétentions pseudo-historiques sur notre territoire, et d’Israël, État raciste se situant par définition aux antipodes de la formule libanaise.

Il n'est pas de plus grande crainte au Liban que de se voir qualifier de pro-sioniste. On peut être pro-syrien au nom de la longue "amitié" existant entre les deux Etats arabes, il est possible de clamer son soutien à la Perse qui tient tête au méchants américains, plusieurs s'affirment francophones et francophiles malgré les errements de la diplomatie arabe de la France, mais lorsqu'on évoque Israël, il est important de bien montrer que l'on n'a pas l'ombre du début d'un semblant d'estime pour un Etat que même un journaliste chevronné et cultivé comme Goraieb qualifiera d'Etat raciste. Qui est l'Etat raciste ? Celui qui fait voter tous ses citoyens selon les mêmes normes et les intègre de la même façon à la vie de la Cité (à moins de considérer que le sort particulier des druzes dans l'armée israélienne soit raciste) ? Ou celui qui refuse d'accorder à plus de 400 000 Palestiniens d'autres droits que de vivre dans des camps insalubres, leur refusant l'exercice de nombreux métiers, craignant leur naturalisation et empêchant par un jeu de lois fallacieuses le mariage avec des citoyens libanais ? L'étranger n'a aucun droit lorsqu'il vit au Liban. Ce n'est peut-être pas du racisme, mais c'est bien de la xénophobie d'Etat. Sans parler du scandale des esclaves à domicile venus du Sri Lanka, d'Ethiopie ou des Philippines. Ou des esclaves sexuels venant par bateaux des pays de l'Est flatter les envies des touristes des pays environnants où la prostitution est péché.

On peut admirer le modèle libanais, qui tente de faire fonctionner la seule démocratie arabe dans un pays minuscule environné de puissants voisins belliqueux. Il n'est pas pour autant nécessaire de flinguer les voisins, surtout le seul dans la région qui puisse se targuer d'une authentique démocratie et d'une économie digne d'un pays occidental. Je suis toujours attristé quand un Libanais ne trouve pas d'autre moyen de vanter son pays qu'en discréditant les autres. M. Goraieb, coincé entre ses convictions pour le 14 mars et sa peur qu'on le disqualifie en tant que Libanais patriote, aurait pu faire l'économie d'un saillie d'antisionisme que partage hélas les dictatures les plus arriérées de la terre.

|

22 février 2007

Ordonnances

L'armée israélienne annonce que le hezbollah n'a jamais été aussi fort. Olmert assure que ça reste une bande de tafioles. Pendant ce temps, le Golan semble être le futur champ de batailles des guerres israélo-arabes. Sans parler de l'Iran qui risquerait d'être bombardé par les Etats-Unis avant la fin du mandat de George Bush. Et au Liban on a inventé une nouvelle expression "la guerre civile froide" pour décrire le climat exécrable entre les différents communautés qui ne se mettent pas sur la gueule mais laissent traîner des explosifs de ci de là, en attendant une vraie bonne occasion de se retaper dessus.

Mais vous allez vous calmer un peu les gars ?

Cet après-midi, j'ai subi le dernier film de Clint Eastwood, celui où il décrit les dernières heures des troupes japonaises à Iwo Jima durant la deuxième guerre mondiale. Je dis subir, car Eastwood a réalisé des films extraordinaires, que ce soit Bridges of Madison County, Midnight in the Garden of Good and Evil, Million Dollar Baby, la liste est longue mais là, non. Plus de deux heures pour nous expliquer que les Japonais étaient gentils comme les Américains, qu'ils avaient le sens de l'honneur mais simplement qu'ils étaient dans l'autre camp... bref, l'idée qu'il existe un code de chevalerie des guerriers qui permet de les hisser du rang de la brute sauvage à celui de défenseur de la patrie, pitié... On est en 2007, je ne suis pas du tout antimilitariste et je suis heureux de savoir qu'il existe des forces armées qui nous protègent de la barbarie pure. Mais qu'on pense encore qu'il y a de la noblesse dans la guerre, et que cela excite encore les jeunes générations qui rêvent d'en découdre pour prouver leur courage, c'est déprimant.

Je vais être naïf et prétendre que je ne connais pas du tout le Moyen-orient : est-ce que cela ne profiterait pas à tous qu'il y ait la paix entre les peuples ? Est-ce que le besoin de se réfugier dans la religion et la violence n'est pas motivé par la détresse matérielle qu'on déguise sous de plus nobles motifs ? Le problème c'est que le bonheur sur terre n'est pas l'objectif de tous. L'Europe y a relativement accédé en arrachant la religion du pouvoir temporel. Les religions monothéistes promettent le paradis après la mort, à condition qu'on vive l'enfer sur terre. En refusant de croire à une vie meilleure dans l'au-delà, l'homme a réussi à transformer sa vie pour en faire parfois une quête frustrante de la félicité permanente, mais le plus souvent une prise en main responsable de sa destinée. Mais certains ont fait le choix de ne considérer leur passage sur terre que comme une expérience transitoire destinée à montrer leur loyauté à un dieu hypothétique, ce qui explique qu'ils accordent à leur existence et à celle des autres une importance minime. Même dans un Etat prétendument laïc comme la Syrie, la notion de bonheur est supplanté par l'aliénation des foules qui suivent un leader qui les mène à leur perte, faure de réaliser qu'un autre régime est possible. A force de manger de la propagande expliquant que le régime syrien est un incompris, que le voisin libanais est un ingrat et l'Israélien un cancer à éradiquer, j'imagine sans peine que le citoyen lambda en Syrie, comme dans 1984, ne parvient pas à imaginer autre chose que son quotidien misérable.

On a cru les idéologies mortes avec la chute du mur de Berlin ; elles sont au contraire vivaces comme jamais. Qu'elles s'appellent religions, baasisme ou sionisme dans sa forme de reconquête de terres "historiques", elles continuent de pourrir la vie des peuples qui n'ont pas réussi à parvenir au stade où il pourrait s'affronter sur des questions consensuelles. Je l'ai déjà dit, je le répète : je me réjouis de l'élection présidentielle française, malgré ses candidats folkloriques d'extrême-gauche, elle met aux prises deux choix de société assez semblables, deux petites options qui jouent à se faire peur avec l'ogre Le Pen. La France est peut-être vieille, usée, fatiguée et sur le déclin ; mais elle n'a plus cette maladie de jeunesse, peut-être parce qu'elle a été vaccinée en 1789 avec une piqûre de rappel en 1848, qui lui ferait résoudre ses problèmes par la violence. Espérons qu'elle aille dans le bon sens, et ne rejoigne pas le Moyen-orient qui lui continue d'avoir la rage.

Encore une preuve de cette fièvre de la punition : le blogueur égyptien Abdel Karim Suleiman a été condamné à trois ans de prison pour avoir insulté l'islam et un an pour avoir diffamé le "président". Pour avoir subi pareilles menaces jadi, sans qu'elles aient été mises à exécution, je suis marqué par le sort de ce jeune étudiant qui pour avoir cru qu'Internet était un instrument de libération, va croupir dans les geôles du pharaon, avec de vrais criminels, mais aussi avec des homosexuels dont le seul crime est d'aimer différemment. Cette peur de la différence est un symptôme d'une société bien malade. Je ne pense pas qu'en tant que Français je sois finalement si bien placé pour juger un pays comme l'Egypte. J'espère juste qu'Abdel Karim Suleiman ne sera pas oublié, et qu'une prise de conscience mondiale des blogueurs pourra faire fléchir la "justice" égyptienne. Je compte une fois de plus sur vos suggestions.

Allez, une blague pour finir, elle circule de façon virale (quand je vous parlais de vaccins....) : Les chrétiens du Liban ont deux leaders, un médecin qui n'a jamais vu de malade, et un malade qui n'a jamais vu de médecin. Je vous laisse deviner qui est qui, et j'arrête pour aujourd'hui les analogies médicales. Dans quelques années, vous pourrez les retrouver dans mes annales.

|

20 février 2007

"Spartans! Tonight, we dine in Hell!"

Encore une bizarrerie d'un pays décidément peu porté sur la chose militaire mais amateur de conflits en tous genres : les jeunes Libanais sont désormais dispensés de service sous les drapeaux. Evidemment, le service national au Liban était l'occasion pour les appelés de se servir de tous les pistons imaginables pour y échapper, de prolonger leurs études pour accéder automatiquement au rang d'officier en cas de bac + 5 ou de prétendre avoir déjà reçu un éducation militaire dans un autre pays en cas de double nationalité. Jusque là, ce n'était pas très différent de la France (votre serviteur tient à souligner qu'il a fait son service militaire, et même long, s'il vous plaît. Ouais.). Ce qui est curieux, ce n'est pas que les jeunes refusent de servir dans l'armée, mais plutôt que certains fuient l'institution militaire pour rejoindre une milice armée, où ils recevront un entraînement tout aussi martial. Au final, en ces temps troublés, ces jeunes militants auront plus de chances de mourir au combat dans ces clans armés que s'ils étaient enrôlés régulièrement dans les forces de l'ordre légales de du pays. Ce choix des armes reflète hélas la division d'un pays qui n'a même pas d'unité au niveau de son armée, symbole pourtant fort d'une nation, et qui peut même en garantir parfois les institutions démocratiques.

La question de la nation continue donc de se poser avec force au Liban. Un article de L'Orient-le jour, en relatant les conclusions d'un débat discret, tente d'éclairer les positions du hezbollah, pour qui le parrain syrien restait garant d'une certaine stabilité politique chez son modeste voisin de l'est :

...leur formation se sentait rassurée quand le Liban était sous tutelle syrienne. Dès lors, le Hezb, se vouant à sa mission de résistance, ne portait pas d’intérêt marqué aux questions de politique intérieure, ni à la participation au gouvernement ni même aux nominations aux postes-clés de l’Administration. Mais, poursuivent-ils, lorsque les troupes syriennes se sont retirées, le Hezb s’est trouvé contraint de défendre ses positions à travers une participation au pouvoir qui implique autant une présence au gouvernement que l’obtention d’une part d’influence, donc de postes, au sein de l’appareil étatique, toutes administrations confondues.C’était d’autant plus nécessaire, ajoutent ces sources engagées, qu’il n’y a plus d’arbitrage syrien pour régler des différends interlibanais pouvant avoir, d’une manière ou d’une autre, un impact négatif sur la résistance. [...] Et la solution du conflit, l’arbitrage en somme, réside finalement dans le poids que chacun représente dans la balance. Autrement dit, suivant cette logique, le Hezb ne peut plus se permettre le luxe de rester de côté, quand, à son avis, le camp du président du Conseil ne sert pas la résistance.

Ce raisonnement paraît logique, en ce que le hezbollah n'a commencé à avoir des prétentions politiques qu'à partir du retrait syrien, qui l'a placé devant un choix difficile : devrait-il devenir un mouvement libanais, dont les intérêts peuvent parfois être contradictoires avec la Syrie, ou continuer une politique plus panarabe en continuant à jouer de l'antisionisme comme ciment d'une alliance hétéroclite et parfois antagoniste, comme dans le cas de l'Irak et du Koweit pour ne citer que le conflit interarabe le plus spectaculaire ? La solution bien sûr a été fournie par Israël, utile bouc émissaire de dictatures continuant à promettre la paradis sur terre en cas de destruction de l'Etat hébreu.

Israël alerte la communauté internationale sur le renforcement de l'arsenal du hezbollah, déclarations prises comme de la provocation par les opposants au sionisme. De son côté, le parti de dieu ne dément pas, et affirme se préparer à toute éventualité. Pendant ce temps, les incidents se multiplient entre la FINUL et des éléments hostiles au Liban-sud, ce que peu de journaux occidentaux relèvent. Si demain l'Union européenne se décidait à qualifier le hezbollah de groupe terroriste, de qui les troupes de la FINUL devraient-elles le plus se méfier ? Cette idée d'abolir le service national tombe au plus mal, car une présence civile au sein des forces armées auraient eu également le mérite de faire prendre conscience de la diversité des communautés libanaises, mais aussi de leurs intérêts communs. Au fait, les hezbollahis étaient-ils dispensés de service militaire, ou ont-ils appris les rudiments de leur métier dans la régulière ?

Une dernière réflexion : en quelques années, l'opprobre internationale s'est déplacée de l'Arabie séoudite, particulièrement vilipendée après les attentats du 11 septembre, vers l'Iran, dont la menace atomique effraie jusque dans les villages du Midwest. L'opinion publique mondiale a enrichi son vocabulaire en découvrant que les différentes sorts de musulmans n'étaient pas "terroristes" et "modérés", mais "chiites" et "sunnites". Aujourd'hui, les dictatures sunnites semblent être celles qui détiennent la voie de la sagesse, alors que les rares puissances chiites sont celles qui agitent la menace d'une apocalypse à l'échelle moyen-orientale puis mondiale. Comment en est-on arrivé à considérer l'Arabie séoudite comme un facteur de stabilité au Moyen-orient et à se reposer sur la sagesse de Riyadh pour arbitrer, comme à l'époque de Taef, les querelles libanaises ? L'intérêt d'un blog, c'est que vous allez sûrement m'aider à comprendre ce retournement de situation digne de l'URSS entre 1939 et 1941.

|

19 février 2007

AGB@blogger.com

J'ai reçu un email de l'Administrateur Général des Blogs me demandant pourquoi j'étais en rupture de contrat, vu que je ne parle pas du Liban en ce moment. Je lui ai répondu sèchement qu'il n'y avait rien à dire, que c'était le même bordel, que le hezbollah cherchait le plus sûr moyen de tout péter en récupérant les miettes, et que la majorité tente tant bien que mal de garder ses prérogatives. L'AGB m'a relancé vertement, me disant que mon boulot, c'était quand même de parler du Liban même s'il ne s'y passe rien de nouveau, et que les gens qui viennent de Yahoo! depuis la page Liban risque de protester, merde ! Je lui ai fait savoir qu'il n'avait qu'à me reprogrammer dans une autre catégorie, que j'en avais rien à foutre, et que si je déménageais en Pologne, je n'allais de toute façon plus parler autant du Liban. L'AGB m'a dit d'aller m'y faire voir, en Pologne, et m'a donner une semaine pour reparler du Liban, sinon, on va voir ce qu'on va voir. A quoi je lui ai dit que mon blog cherchait à provoquer l'échange, et pas échanger de la provoc, ce qui lui a fait dire que je deviens vieux si je commencer à recycler mes comments en posts, et que je ferais mieux de publier rapidos quelque chose d'intéressant, sinon.

On en est donc là, mais je n'ai pas envie de décrire l'entropie libanaise en ce moment, désolé. Il faut dire qu'en France, c'est nettement plus intéressant. Augustin Legrand invente l'humanitaire à mi-temps. De retour d'un tournage en Afrique du Sud, le comédien leader des enfants de Don Quichotte s'insurge "ben alors, c'est pas possible, vous avez rien branlé pendant que j'allais bosser ? Attendez, je suis intermittent, moi, je peux pas être là tout le temps sinon je toucherai pas mes allocs". Ce qui fait dire à une majorité de Français que si Bayrou était au second tour, il voterait pour lui contre Ségo ou Sarkon selon "un sondage Ifop pour LCI et Fiducial publié lundi". Bayrou quant à lui réinvente la politique à la normande : p'têtre ben que oui, mais p'têtre ben que non. Et certains de soupirer avec aise qu'il choisirait un premier ministre de gauche. C'est ça qui est formidable avec le vote Bayrou ; on peut voter à droite en ayant une bonne consience de gauche, ou voter à gauche en pensant qu'on a fait un vote responsable et mature.

Et puis, pour fêter l'année du cochon, Papon est mort, mais l'Irak continue d'abriter le plus grand concours mondial d'attentats. A la FNAC, les livres sur Chirac fleurissent ou refleurissent, on a même droit à un bouquin sur sa fille qui ira travailler dans un grand cabinet de relations publiques à NYC quand son papa ne sera plus roi de France. Ce soir, Ségolène affronte cent Français dans une émission sur TF1, après que son Etat-major ait juré que c'était truqué pour Sarkozy, vu que les journalistes, c'est bien connu, sont tous de droite. La semaine passée, dans la même émission, on avait eu droit à quatre extrêmes d'un coup. Ils avaient tous la tête de l'emploi, surtout Buffet. Je l'imagine il y a trente ans, à passer ses vacances en Tchécoslovaquie et à vanter les mérites du modèle cubain. Besancenot est rentré dans le rang : il commence à faire des promesses bidon comme les autres, plutôt que de parler de grand soir. C'est à ça qu'on voit qu'un pays s'embourgeoise, même ses militants d'extrême gauche ne veulent plus d'une révolution qui menacerait leurs acquis sociaux.

Vous le sentez, vous aussi, qu'il ne se passe pas grand chose ? Même pas de foot ou de cyclisme pour me faire râler. Moi, ça m'inquiète, on dirait les grandes vacances d'été. Or, l'an passé, en été, on a eu la guerre au Liban. Voilà, je me suis remis en règle avec l'AGB.

|

15 février 2007

Post blanc ou nul

Qu'est-ce que j'apprends ? Total a fait des profits record ? Total marche bien ? Mais c'est un scandale !! Il faut immédiatement ponctionner la bête et la faire cracher au bassinet ! Quelle honte, où est Robin des bois ? Salopards de capitalistes qui font de l'argent ! Ils pourraient au moins avoir la décence de licencier la moitié de leurs salariés !

En France, on a toujours du mal à sortir du modèle soviétique. Je sais qu'en général, c'est Le Pen qui parle de pays socialo-communiste, mais quand j'assiste à des débats aussi arriérés que "saignons les entreprises profitables pour leur apprendre que le capitalisme c'est mal", je tombe des nues. Que Total soit une entreprise qui ne contribuent pas forcément au bien-être public, certes, mais L'Oréal et ses crèmes pour flippées de la jeunesse éternelle non plus. Total n'a pas à être une entreprise morale, le capitalisme n'est pas moral, c'est la politique qui doit définir les règles du jeu et les faire respecter par les entreprises. Or, gagner de l'argent n'est ni illégal, ni immoral. Et l'argument démagogique comme quoi "on pourrait construire des écoles et des hôpitaux avec l'argent qu'on dépense en armement" est aussi imbécile que "CRS = SS". Une société a besoin de diversité, de flics comme d'infirmières, de pétrole (hélas, pour le moment) comme de crèmes de jouvence. Mais on est en pleine période électorale, alors tous les coups (bas) sont permis.

Pour cette élection présidentielle, nous avons au moins trois candidats qui refusent l'économie de marché. Quelle aberration dans un pays comme la France ? Comment en sommes-nous réduits à apparaître comme un pays idéologiquement proche de la Corée du Nord ? Deux tiers des Français se plaindraient de la médiocrité de la campagne présidentielle. Mais nous la méritons cette campagne ! Comme les jeux du cirque, les affrontements entre candidats nous rendent bien aise, car nous sommes dans un pays riche et prospère qui peut supporter une présidence défaillante comme l'a été celle de Jacques Chirac, et nous sommes d'accord majoritairement sur un certain nombre de grands thèmes, comme la laïcité ou la nécessité d'une politique étrangère active. Mais pas sur l'économie de marché !

On veut aussi fréquemment faire passer la France pour un pays raciste, alors même qu'il s'agit d'une des plus anciennes terres d'assimilation. Combien de générations d'immigrés se sont installés en France pour le meilleur ? Combien de pays se posent la question de l'intégration des étrangers ? Pas le Liban, pas la Syrie, pas l'Arabie séoudite, pas Dubai, pas l'Algérie, pas la Chine, et la liste est longue. Jean-Marie Le Pen s'est trouvé une niche électorale, avec la peur de l'étranger avec un couteau entre les dents, comme le bolchévique d'une autre époque. Il fera cette année un meilleur score qu'avant 2002, parce que les états-majors des partis politiques et des médias ont décrété que les électeurs lepénistes sont des salauds, alors que ceux du PCF, en voie d'extinction, ont le droit de se tromper sur le très long terme. Je ne voterai JAMAIS Le Pen, mais je suis outré qu'on considère qu'un cinquième au moins de la population française est lépreuse et n'a même pas droit à une représentation à l'Assemblée nationale. Non, la France n'est pas raciste, mais elle conserve encore aujourd'hui des restes décatis de gauchisme aveugle, où on se devait de se tromper avec Sartre, et où l'on pardonne tout aux anciens Maoïstes, sauf de se rallier à Sarkozy.

J'aime la France, et l'avoir quitté depuis longtemps me permet de me rendre compte à quel point c'est un pays merveilleux. Merveilleux, mais qui tourne en rond, ou tout du moins se regarde le nombril. La France de Bayrou me fait plus peur que celle de Le Pen : persuadé que l'Europe sera la panacée alors même qu'il est allié au parlement européen aux nationalistes basques, le petit François vit dans une France poussiéreuse qui rassure ses électeurs. Le PS et l'UMP sont des machines de guerre qui veulent détruire la démocratie, clament en choeur Le Pen et Bayrou. Mais dans dix ans, quelle France veulent François et Jean-Marie ? Celle de 1960, que l'on voit dans les films en technicolor et où la France faisait entendre sa voix dans le monde entier. On aimerait l'entendre la voix de la France, et d'abord qu'elle accepte que le hezbollah soit sur la liste des organisations terroristes. Une France forte, cohérente, qui ne prétendrait pas s'apitoyer sur le sort de l'Afrique tout en favorisant les grandes entreprises dans leurs contrats africains, avant de leur reprocher leurs profits record. Quel que soit le vainquer en mai, il nous fera sortir de la Chiraquie, c'est un début, mais camarades, encore un effort pour sortir du socialo-communisme.

|

13 février 2007

...et parfois le Liban ressemble plus à l'Irak

On s'attendait à des troubles pour la commémoration de l'attentat contre le premier ministre Rafic Hariri. Il y a deux ans demain, le deuxième homme le plus protégé du Moyen-orient (le premier semble toujours être dans le coma) a été assassiné par ceux qui avaient intérêt à ce que la Syrie continue sa mainmise au Liban par le biais de ses groupes terroristes travestis en partis politiques. Aujourd'hui, deux bombes ont tué au moins trois personnes et blessé une dizaine de voyageurs de minibus à Bikfaya, fief des Gemayel. Aux abrutis qui soutenaient que le meurtre de Pierre Gemayel il y a quelques mois était destiné à attirer la compassion de l'opinion publique internationale sur le mouvement du 14 mars, voilà un cinglant démenti : non, il ne s'agit pas de paranoïa, les forces opposées à la démocratie sont prêtes à tout pour empêcher l'instauration d'un tribunal international qui les forcerait à battre en retraite. Car je crois peu à la destruction de ces groupes terroristes, je pense juste qu'ils pourront être rejetés en périphérie. A moins que tous les pays s'entendent sur une définition du terrorisme, et une classification des groupes antidémocratiques, dont le hezbollah.

Demain donc, de grandes manifestations se préparent pour commémorer l'assassinat de Rafic Hariri. Le risque majeur, c'est que les groupes pro-gouvernementaux en profitent pour régler leurs comptes avec les insurgés du centre-ville, ce qui risque d'être sanglant, il n'y a pas que des nargilés dans les tentes hezbollahis. On peut compter sur l'armée pour faire son travail, mais la manifestation risque d'être massive et de déborder les forces de l'ordre. On pouvait compter sur l'esprit de discipline qui anime les partis politiques libanais soucieux de ne pas voir la situation dégénérer plus qu'elle ne l'est actuellement ; l'attentat d'aujourd'hui risque toutefois d'attiser les rancoeurs contre le hezbollah et ses alliés, et menacer la solennité d'une cérémonie qui aurait du rappeler à tous, au-delà de la mort de Hariri, le sursaut démocratique dont a été capable le Liban.

Hariri n'était pas le grand homme intègre et altruiste que ses fidèles proclament. Homme d'affaires brillant, il avait su profiter de la reconstruction du Liban pour, selon la tradition libanaise, mélanger ses intérêts privés avec ceux du pays. Solidere reste une formidable machine à capter les subventions, et chaque Beyrouthin dispose d'une anecdote concernant sa famille sur les spoliations qu'a accompli Solidere pour transformer le centre-ville en attrape-bédouins. Pour le moment, Downtown acceuille surtout des insurgés réclamant la chute de la démocratie et hurlant leur haine de l'occident. Espérons juste que demain ne sera pas une nouvelle occasion pour le hezbollah et ses amis armés d'indiquer à nouveau le chemin du chaos pour un pays qui a surtout besoin d'oxygène. Quant à Hariri, malgré sa personnalité trouble et son rôle dans la chute de la maison Liban, il mérite néanmoins comme tout homme d'être respecté, victime des vrais mafieux qui gangrènent le pays en prétendant en être le vaccin.

|

11 février 2007

Parfois, le Liban ressemble à Cuba

Le dernier classement des sites de "réinformation" vient de paraître, je vous le laisse en pature. Comme vous le remarquerez, ce blog se maintient à une place honnête pour un travail de "dilettante" (en tout cas sans autre ambition que l'échange), mais se trouve parfois fort mal entouré. Ainsi, un autre blog sur le Liban se trouve plus loin dans le classement, je vous laisse apprécier sa prose, je sais que j'ai eu du mal à lire son analyse de la "propagande homosexuelle". En tête de ce classement hétéroclite, les sites cathos, mais aussi Reporters sans frontières, comme quoi on trouve de tout dans les sites alternatifs, et pas que du facho.

Ce classement me dérange moins que la première fois, d'autant que je n'ai jamais rien fait pour attirer des lecteurs : un titre en anglais (au début, le blog était en anglais) mais un contenu en français, des commentaires qui sont apparus très tard, un sujet assez peu dans l'air du temps, pas d'histoires sur ma vie sexuelle au bureau et pas de prises de position contre Bush ou le complot sioniste. Lorsque la guerre de juillet a éclaté, de plus en plus de visiteurs sont venus pour rester en contact avec le Liban et le blog est devenu un hub d'échanges pendant une situation stressante où l'avenir du pays était encore plus compromis que d'habitude. J'étais content d'échanger avec des amis virtuels aussi désemparés que moi ; mais j'appréhendais un peu le succès du blog qui m'aurait fait remarquer, et causer de nouveaux ennuis avec des mauvais coucheurs. Peu comprennent qu'un blog, ce n'est pas un média, que c'est personnel et que les idées qu'on exprime par ce biais n'ont pas la prétention d'être objectives. C'est même le principal attrait d'un blog : sa subjectivité qui permet de combattre efficacement, quand on en lit plusieurs sur le même sujet, la pensée unique. Il paraît que ce classement recense les sites contre la pensée unique, ça tombe bien.

Je souhaite donc curieusement que vous ne soyez pas plus nombreux à venir ici à l'avenir. Pour le Liban, ce serait une mauvaise nouvelle, il ne faut pas qu'on s'y intéresse trop. Mais pas qu'on l'oublie non plus. Le pays n'est pas calme, il est au contraire en pleine phase de réarmement. J'espère que mes prochains posts concerneront plus la campagne présidentielle française, et pourquoi Bayrou est devenu le choix de ceux qui veulent voter Le Pen mais hésitent. Je préfère ça à une chronologie morbide d'une guerre qui cogne et vocifère dans sa boîte de pandore. Pas vous ? Merci quand même de venir me lire, j'aime vos commentaires.

|

09 février 2007

acta est fabula

L'armée libanaise qui échange quelques coups de feu avec l'armée israélienne, l'armée du Liban qui s'empare d'un camion d'armes appartenant au groupe terroriste Hezbollah, mais que se passe-t-il dans un pays où l'on avait l'habitude de considérer les forces militaires comme un club de vacances pour fainéants pistonnés ? Serait-ce le retour d'une armée digne de ce nom, soutenue par tous les pays arabes, armée par l'occident, entraînée par les académies les plus prestigieuses ? On ne peut que se réjouir d'un potentiel retour à l'ordre, même si le hezbollah continue à jouer les provocateurs, comprenant l'instabilité de sa situation et l'échec de sa révolution, d'autant plus que le voisin palestinien semble avoir trouvé une solution de compromis avec un gouvernement d'union nationale à l'israélienne. La partie est perdue pour le parti de dieu, à moins de tenter le tout pour le tout et de replonger durablement le pays dans un chaos dont il saurait se satisfaire : dieu reconnaîtra les siens. En l'occurence, un parti basé sur le fanatisme sera heureux d'envoyer ses troupes créer des martyrs dans un nouveau retour à l'obscurantisme.

Il semble qu'en France on ait évité cet obscurantisme, en tout cas pour le moment. Le procès de Charlie Hebdo a permis de mesurer la popularité d'une vieille idée que certains souhaitaient dépoussiérer, mais qu'il fallait juste aérer : la laïcité républicaine, garante de la paix sociale entre les joyeux croyants et les fâcheux athées comme moi. Ségolène a enoyé un SMS à Philippe Val, Sarko y est allé de son soutien, Bayrou a été jusqu'à se déplacer, comme François Hollande. L'honneur de la république est sauf, et le journal satirique sera probablement relaxé. Mais pourquoi Charlie a-t-il été le seul organe de presse a être poursuivi ? Pourquoi pas France Soir ou L'Express, également coupable d'être iconoclastes ? Il semble que les fanatiques religieux aient, comme à leur habitude, cherché à attaquer le plus faible, et devant la réaction de Chirac qui n'a pas levé le petit doigt pour défendre la liberté d'expression (bien au contraire, puisqu'il a parlé de provocation), on aurait pu considérer que leur stratégie de hyènes puisse être gagnante. La France a encore de bons réflexes, et cette unité républicaine rassurante montre que le pays peut encore, lorsqu'il est menacé dans son essence, se battre contre ses ennemis dans une union sacrée tout ce qu'il y a de plus profane.

Et pendant ce temps, où se trouve Mohammed ? Si l'on en croit un obscur auteur italien, Dante Alighieri, il croupirait dans un des huitièmes cercles de l'Enfer, celui réservé aux Semeurs de discorde, où ils seront perpétuellement mutilés. Je ne peux qu'encourager les imams fondamentalistes à faire un procès à ce monsieur Alighieri qui ose prétendre que le prophète serait condamné à l'enfer, alors qu'il est de notoriété publique qu'il appartient au paradis. Que l'on brûle quelques ambassades italiennes pour apprendre à ces mécréants qu'on ne rigole pas avec un prophète qui n'a jamais fait de mal à une mouche, mais qui a passé un paquet d'infidèles au fil de son épée (que les chrétiens se rassurent, le pape Nicolas III serait également au 8ème cercle, mais avec les Simoniaques, donc brûlés la tête en bas).

|

06 février 2007

Charlie, défends-moi

Le mouvement du 11 mars entend faire la synthèse, ou se situer à égale distance, du 8 et du 14 mars. La photo à gauche vous donne une idée de leur concept qui se veut une pause dans l'affrontement des partis politiques par couleurs interposées. Il est vrai que, devant la violence qui rôde au Liban, chacun fait assaut de communication plutôt que d'armes afin de convaincre le plus grand nombre de la justesse de sa cause. De son côté, un comité libanais dont on ne sait pas grand chose appelle à former une chaîne humaine le 10 février. Voilà les dernières nouvelles du Liban, je ne vais pas vous barber avec les discussions interpoliticiennes, on retombe dans les bonnes vieilles habitudes où les chefs de clan prennent le café en discutant de combien de citoyens ils sont prêts à sacrifier pour asseoir leur trône.

Bien, ça nous fait des vacances. Ou plutôt ça nous permet de nous concentrer sur une affaire d'importance.

Je veux parler d'un procès crucial pour la civilisation : celui qui oppose l'hebdomadaire français Charlie Hebdo aux islamistes. Les 7 et 8 février, le magazine satirique devra se défendre d'avoir insulté la religion musulmane il y a un an exactement en publiant un certain nombre de dessins d'humour, dont la fameuse couverture signée Cabu où Mohammed se lamentait en déclarant "c'est dur d'être aimé par des cons...". De nombreuses personnalités sont venus soutenir le journal, qui est défendu comme d'habitude par l'avocat Richard Malka, mais aussi par Georges Kiejman, ancien ministre de François Mitterrand (et avocat notamment de la famille Trintignant dans l'affaire du meurtre de Marie T.). Le risque de la plainte pour "injure publique à l'égard d'un groupe de personnes en raison de leur religion", c'est que les lois antiracistes se transforment en lois antiblasphèmes, comme le note Charlie Hebdo. Le procès est donc essentiel, car dans un pays laïc comme la France, on dispose encore du droit de se moquer du sacré, sans pourtant insulter ceux qui le vénèrent. Si les islamistes gagnaient leur procès - ce qui n'est pas encore assuré car Charlie a souvent gagné ce genre d'attaques fallacieuses, notamment contre des extrémistes chrétiens - ils seraient de plus en plus difficile de critiquer des institutions comme les religions dont pourtant les seuls garde-fous dans notre pays sont la raison et la vigilance des républicains.

J'espère de tout coeur que les islamistes seront déboutés dès le premier procès, il en va de l'un des piliers de notre République. D'un autre côté, il faut espérer que la communauté musulmane ne sera plus assimilée à l'avenir à une religion terroriste, les affaires du voile comme les scandales des mariages forcés ayant jeté une ombre diabolique sur ce culte pourtant comme les autres : ni plus con, ni moins. Personne ne doit être discriminé à cause de son appartenance religieuse, cela inclut aussi les athées qui ont le droit de ne pas faire le signe de croix, de ne pas porter la kippa ou de ne pas mettre un voile sur les femmes. Et en France, on a encore le droit d'être athée, et de raconter des blagues de curés ou de rabbins. On doit aussi pouvoir rigoler avec les imams.

|

04 février 2007

Nous

La peur d'une guerre civile a été tellement forte la semaine dernière que le pays se calfeutre en se reposant sur d'éventuelles médiations irano-saoudienne, des interventions d'Amr Moussa ou l'arbitrage de Michel Platini. La situation politique, sans parler de l'économie, devient tellement catastrophique que la moindre lueur d'espoir est considérée avec intérêt par une population qui se demande si, finalement, c'est une bonne idée de prôner l'amour du prochain tout en affutant ses armes pour lui mettre sur la gueule au besoin. Si l'on atteint le chiffre hallucinant de 100 morts par jour en Irak juste en comptant les attentats, à combien pourrait-on évaluer le chiffre pour un Liban qui sombrerait de nouveau dans la guerre civile ? Personne ne profiterait d'un Liban irakisé, si ce n'est ceux qui annoncent depuis toujours que la vie sur terre n'a aucune importance, seul compte le paradis promis par un dieu qui demande auparavant des âmes acquises sur les champs de bataille. Quelle schizophrénie que ce dieu qui porte autant de noms différents et qui exige que l'on s'entretue pour chacune de ses interprétations. Tout le monde veut la paix au Liban mais personne n'est prêt à accepter que la religion continue à être un facteur important de divisions.

Car quelle est la différence fondamentale entre le hezbollah et les autres partis ? A part les armes lourdes, que le parti officiel de dieu possède en grand nombre, et son financement qui provient en grande partie de l'étranger, il reste le seul à être un parti exclusivement fondé sur la vénération d'un dieu de guerre. Les autres partis possèdent une obédience religieuse, mais ne fondent pas leur "programme" exclusivement sur cette appartenance. Et quelle déception que ce mouvement de Michel Aoun, qui revendiquait la laïcité pour le Liban et qui s'allie avec le parti de la mort et de la haine systématisées !? On espérait tellement de ce coup de pied salutaire de l'exilé dans la politique libanaise, contre la corruption et les mauvaises habitudes. Aujourd'hui, qui pourra sauver le Liban ? Alors qu'en France, on continue de croire, comme un bon petit pays catholique laïc, à l'homme providentiel, au Liban c'est pire, on attend le messager de dieu qui mettra tout le monde d'accord devant sa sagesse divine.

Comme le peuple n'a pas son mot à dire dans les évènements libanais et qu'il sert juste à exprimer par la force les revendications territoriales de ses maîtres, quoi de mieux que de regarder la télé en attendant que ça passe ? Hier soir, encore un exploit signé Ruquier, qui reste quoi qu'on en dise un formidable animateur. Dans son émission dont j'oublie le nom vu que les émissions de deuxième partie de soirée en possèdent tous un similaire, on a pu presque enfin débattre de ces notions de clan que sont la droite et la gauche. Un jeune "comique", fort de son bon droit, dresse le portrait des invités avec brutalité mais prétention burlesque ; arrivé à doc Gynéco, soutien affirmé de Nicolas Sarkozy, le bouffon se fait redresseur de torts : hé dis, donc, c'est pas bien ce que t'as dit sur les jeunes de banlieue ! Doc Gynéco, qui en vient, demande à son assesseur s'il vient de la banlieue, et celui-ci de répondre piteusement non mais qu'il n'aime pas qu'on attaque la banlieue ! Le débat s'engage alors entre les belles âmes de gauche, qui avouent pour la plupart ne pas savoir pourquoi ils en sont sinon pour montrer leur grand coeur, et ce personnage plus complexe qu'il n'y paraît d'ancien rappeur reconverti dans la retape pour un candidat d'une droite de choc. Etre de droite, être de gauche, voilà encore bien des appartenances d'une crétinerie sans nom, au même titre que soutenir Marseille contre Paris en football et vice-verse. Se positionner aussi fortement dans un camp, en particulier pour se battre contre le camp adverse : au Liban, ça donne des bagarres de rue, avec des morts ; en France, parfois de beaux moments de télévision, mais posons-nous posément la question, quand passera-t-on au stade supérieur, où pour se définir on parlera de soi et de ses idées propres, plutôt que d'affirmer faire partie du clan de la caverne des ours ?

|
Weblog Commenting and Trackback by HaloScan.com